Théophile Gautier

  • Dans le boudoir ambré d’une jeune marquise,
    Grande d’Espagne, belle, et d’une grâce exquise,
    Au milieu de la table, à la place de fleurs,
    Frais groupe mariant et parfums et couleurs,
    Grimaçait sur un plat une tête coupée,
    Sculptée en bois et peinte, et dans le sang...

  • Suave et pur jasmin d’Espagne
    Où se posa l’abeille d’or,
    Une grâce vous accompagne,
    Et vous possédez un trésor ;

    Vous, le sourire de la force,
    Le charme de la majesté,
    Vous avez la puissante amorce
    Qui prend les âmes — la bonté !

    Et, derrière l’...

  • La cloche matinale enfin a sonné l’heure
    Où les pâles Willis, qu’un jour trop vif effleure,
    Près du sylphe qui dort vont se glisser sans bruit
    Au cœur des nénufars et des belles-de-nuit ;
    Giselle défaillante avec de molles poses
    Lentement disparaît sous son linceul...

  • Devant toi l’Éléphant dressant en l’air sa trompe
    De son phallus géant décalotte la peau ;
    Le régiment qui passe agite son drapeau
    Et le foutre jaillit comme par une pompe.

    Tu n’as qu’à faire voir pour qu’un saint se corrompe
    Ta...

  • À la Bidassoa, près d’entrer en Espagne,
    Je descendis, voulant regarder la campagne,
    Et l’île des Faisans, et l’étrange horizon,
    Pendant qu’on nous timbrait d’un nouvel écusson.
    Et je vis, en errant à travers le village,
    Un homme qui mettait des balles hors d’usage...

  •  
    I

    Oh ! mon Jean Duseigneur, que le siècle où nous sommes
    Est mauvais pour nous tous, oseurs et jeunes hommes,
    Religieux de l’art que l’on nous a gâté !
    L’on ne croit plus à rien ; — le stylet du sarcasme
    A tué tout amour et tout enthousiasme ;...

  • EN REPONSE À L’ENVOI D’UN FRAGMENT DE L’« APOTHÉOSE D’HOMÈRE »

    Du plafond où, les pieds sur le blanc escabeau,
    Trône Homère, au milieu de l’immortelle foule
    Dont le chœur dans l’azur s’étage et se déroule,
    Pour m’en faire présent tu coupas un lambeau....

  • Dans un café plus noir qu’un antre,
    En rang d’oignons sur un bahut,
    Six coquins regardent un ventre
    Qui danse tout seul le chahut.

    Avec ce ventre ferme et lisse
    Qu’agite un tordion subtil
    Plus d’un galant, sans la police,
    Irait bien trinquer du nombril...

  • Vous avez un regard singulier et charmant ;
    Comme la lune au fond du lac qui la reflète,
    Votre prunelle, où brille une humide paillette,
    Au coin de vos doux yeux roule languissamment ;

    Ils semblent avoir pris ses feux au diamant ;
    Ils sont de plus belle eau qu’une...

  • Vous partez, chers amis ; la bise ride l’onde,
    Un beau reflet ambré dore le front du jour ;
    Comme un sein virginal sous un baiser d’amour,
    La voile sous le vent palpite et se fait ronde.

    Une écume d’argent brode la vague blonde,
    La rive fuit. — Voici Mante et sa...