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    UN JEUNE HOMME

    Où courez-vous ainsi, pieuses jeunes filles,
    Qui passez deux à deux sous vos coiffes gentilles ?
    Ce tablier de soie et ce riche cordon
    Disent que vous allez toutes quatre au pardon.

    UNE JEUNE FILLE

    Laissez-nous, laissez-nous poursuivre notre route,
    Jeunes gens ! Nous allons où vous allez sans doute ;
    Et ces bouquets de...

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    À F. Daubigny.

    Je sais une vallée au fond des bois paisibles
    Où la mousse déroule un tapis de velours ;
    De parfums enivrés par des fleurs invisibles,
    Les ramiers à mi-voix s’y content leurs amours.

    Des grands hêtres touffus le dôme séculaire
    En interdit l’entrée aux regards du soleil,
    Ne laissant tamiser qu’un jour crépusculaire
    ...

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    C’était la veille de Noël,
    Dans une campagne d’Alsace,
    Cheminait par un froid cruel,
    Un homme portant sa besace.

    Las, pour quémander un croûton
    Et se réchauffer l’épiderme,
    Le pauvre homme, avec son bâton,
    Heurta la porte d’une ferme.

    De froid, son visage était bleu,
    Le chasser ? C’eût été dommage,
    On le fit asseoir près du...

  • Le tronc en est creusé par l’âge et par les vers,
    Et, parmi les buissons et les ronces voisines,
    Il engendre, dans ses malfaisantes gésines,
    L’ortie, et la cigüe et les champignons verts.

    Et c’est là dans les trous profonds de ses racines,
    — Lorsque les lourds midis ruissellent au travers
    De l’enchevêtrement des fourrés entr’ouverts, —
    Que s’...

  • Ô larmes de mon cœur, lorsque la bien-aimée
    Fut morte, et que sa tombe, hélas ! fut refermée,
    Quand tout fut bien fini, quand je demeurai seul,
    Ayant vu cette enfant cousue en son linceul,
    Oh ! je ne pleurai pas son âme, non, sans doute !
    Car tout me disait bien que l'âme prend sa route
    Vers les déserts du ciel éthéré ; qu'étant Dieu,
    Elle s'élancera...

  • Noirs alchimistes, verts sorciers,
                Aux gestes fous,
                Quand vous passiez,
                Que cherchiez-vous ?

    Quand vous passiez indifférents
                Dans vos manteaux,
                Comme de grands
                Incognitos ;

    Vous qui d’un œil d’ombre taché
                Fixez sans fin
                Un point caché ;...

  • Le cheval qu’a jadis réformé la remonte
    Est là, près du trottoir du long faubourg qui monte,
    Pour qu’on l’attelle en flèche au prochain omnibus.
    Il a cet air navré des animaux fourbus,
    Sous son sale harnais qui traîne par derrière.
    Mais lorsque, précédés d’une marche guerrière,
    Des soldats font venir les femmes aux balcons,
    Il se souvient alors du...

  • J’ai mis le pied dans l’étrier ;
    Que ton galop, mon fier coursier,
    Au loin m’emporte !
    Ton pauvre maître devient fou ;
    Il faut aller… je ne sais où…
    Qu’importe ?…

    Comme elle me croyait...

  • Un bon père cheval, veuf et n'ayant qu'un fils,
           L'élevait dans un pâturage
           Où les eaux, les fleurs et l'ombrage
    Présentaient à la fois tous les biens réunis.
    Abusant pour jouir, comme on fait à cet âge,
    Le poulain tous les jours se gorgeait de sainfoin,
           Se vautrait dans l'herbe fleurie,
    Galopait sans objet, se baignait sans envie,...

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    Sa toux qui retentit comme une plainte humaine
    Secoue obstinément son grand corps accablé ;
    Mufle bas, jarrets mous, sur sa paille de blé,
    Il n’a mangé ni bu depuis une semaine.

    En vain, à petits pas, un enfant le promène
    Et chasse les taons lourds dont il est harcelé,
    Sa toux qui retentit comme une plainte humaine
    Secoue obstinément son grand...