•     Oui ! cette plainte échappe à ma douleur :
            Je le sens, vous m’avez perdue.
    Vous avez, malgré moi, disposé de mon cœur,
    Et du vôtre jamais je ne fus entendue.

            Ah ! que vous me faites haïr
    Cette feinte amitié qui coûte tant de larmes !
        Je n’étais point jalouse de vos charmes,
    Cruelle ! de quoi donc vouliez-vous me punir ?...

  •  
    C’est celle dont jadis la vaporeuse image
    M’apparut en fuyant, comme un léger nuage
    Glisse en un ciel d’azur…
    (A. J. Guirot)

    Bientôt j’irai dormir d’un sommeil sans alarmes ;
    Heureux si, dans la nuit dont je serai couvert,
    Un œil indifférent donne en...

  • Sombre douleur, dégoût du monde,
    Fruit amer de l’adversité,
    Où l’âme anéantie, en sa chute profonde,
    Rêve à peine à l’...

  •  
    Dieu lui-même a respect de la souffrance humaine ;
    Réelle est la douleur si la cause en est vaine.
            Qu’importe par qui nous souffrons !
    La fleur du bien grandit sur les âpres collines :
    L’homme qui sait porter sa couronne d’épines
            Devient un dieu sous les affronts.

    Ne maudis point, ami, ta suprême torture ;
    Respecte ta douleur,...

  • Toi que j’ai vu pareil au chêne foudroyé,
    Je te retrouve époux, je te retrouve père ;
    Et sur ce front songeant à la mort qui libère,
    Jadis le pistolet pourtant s’est appuyé.

    Tu ne peux pas l’avoir tout à fait oublié.
    Tu savais comme on souffre et comme on désespère ;
    Tu portais dans ton sein l’infernale vipère
    D’un grand amour trahi, d’un grand...

  • Par le jardin royal, en l’arôme des roses,
    La Princesse aux yeux pers, sœur nubile des fleurs,
    Erre en pleurs au vouloir de ses rêves moroses :

    Les mille et mille voix du triomphal matin
    Lui murmurent l’amour, et le soleil sommeille
    En ses cheveux épars sur son col enfantin.

    Un jet d’eau dont la gerbe en perles d’or ruisselle
    Parmi les boulingrins...

  •  
    Les ténèbres du soir sont l’obscure muraille
    Que chaque nuit élève entre la vie et nous,
    Derrière qui, fugace et sinistrement doux,
    L’invisible se meut comme un spectre, et nous raille.

    L’homme se trouble alors et n’ose pas savoir
    Si cette Sœur muette a nos pas attachée,
    Et que nous appelons notre ombre, s’est cachée
    Pour nous laisser plus...

  •  
    Douleur de se reprendre aux choses d’autrefois
    Et de chercher son nom sur les lèvres quittées
    Et de rentrer dans les maisons déshabitées
    Dont le jardin tressaille encore à notre voix !

    Car le cœur du jardin, à travers les années,
    Le doux cœur du jardin surpris du cœur que j’ai
    Murmure : « C’est bien lui, mais comme il est changé !
    Qu’ont vu...

  •  
    Pas de larmes extérieures !
    Sois le martyr mystérieux ;
    Cache ton âme aux curieux
    Chaque fois que tu les effleures.

    Au fond des musiques mineures
    Épanche ton rêve anxieux.
    Pas de larmes extérieures !
    Sois le martyr mystérieux.

    Tais-toi, jusqu’à ce que tu meures !
    Le vrai spleen est silencieux
    Et la Conscience a des yeux...

  •  
    Sur le versant pierreux d’un plateau du midi,
    Respirant le soleil d’un hiver attiédi,
    J’errais en longs détours ; les collines désertes
    D’arbustes odorants étaient au loin couvertes.
    Promeneur attentif au plus humble arbrisseau,
    J’évitais en marchant de blesser un rameau.
    J’avais déjà suivi tous les sentiers des landes
    Sans briser une tige, une...