La Douleur

 
Dieu lui-même a respect de la souffrance humaine ;
Réelle est la douleur si la cause en est vaine.
        Qu’importe par qui nous souffrons !
La fleur du bien grandit sur les âpres collines :
L’homme qui sait porter sa couronne d’épines
        Devient un dieu sous les affronts.

Ne maudis point, ami, ta suprême torture ;
Respecte ta douleur, la douleur nous épure ;
        Laissons le blasphème à l’orgueil.
Le fleuve de la vie aux ondes limoneuses,
Pour rejaillir au ciel en gerbes lumineuses,
        Doit se briser contre un écueil.

Collection: 
1835

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Puisque en tes jours bénis de gloire et de puissance,
Du pauvre jusqu’à toi franchissant la distance,
Tu l’aidas de sa croix à porter le fardeau ;
Et que, sourd aux instincts d’une opulence avare,
Toi, prince, tu couvris les membres de Lazare
       Des plis...

 
LA MÈRE

Pourquoi jeter ta voix si paisible et si douce
A travers ces rumeurs d'un siècle aux fortes voix ?
Ami, crois-moi, résiste au démon qui te pousse ;
Laisse tes faibles chants, comme l'eau sur la mousse
Laisse tes chants couler à l'ombre de nos...

 
La vipère du mal a mordu ta pensée,
Poète, et dans ton sein la colombe blessée
Palpite. Apaise-toi ; ferme ton noble cœur
Aux stériles conseils d’une aveugle douleur.
Souffre ; laisse venir les heures vengeresses.
Mais pour le Mal alors plus de pitiés...

 
Marie, ô douce enfant aux grands yeux de gazelle,
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Toi dont l’âme charmante et les songes premiers
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         Des bengalis et des ramiers !

O douce enfant ! ta vie...

 
Loin d’ici veux-tu fuir ? pauvre couple enchaîné,
Veux-tu nous envoler vers l’île où je suis né ?
Je suis las de contrainte et de ruse et d’entrave.
Le ciel ne m’a point fait avec un cœur d’esclave !
Me cacher pour te voir, pour t’aimer, ô tourment !
Je veux...