Vents, pluie, éclairs faisaient rage de telle sorte
Qu'on n'avait jamais vu de tempête aussi forte.
Sous l'épaisseur des bois par la bise ployés,
Dans les nids, les petits oiseaux mouraient noyés,
Et l'ouragan broyait toutes les créatures
Qui n'ont point...

 
Le ciel était sans dieux, la terre sans autels.
Nul réveil ne suivait les existences brèves.
L'homme ne connaissait, déchu des anciens rêves.
Que la Peur et l'Ennui qui fussent immortels.

Le seul chacal hantait le sépulcre de pierre.
Où, mains jointes,...

 
A l’heure d’amour, l’autre soir,
La Mort près de moi vint s’asseoir ;
S’asseoir, près de moi, sur ma couche.

En silence, elle s’accouda.
Sur mes yeux clos elle darda
Son grand œil noir, lascif et louche ;

Puis, comme l’amante à l’amant,
Elle...

 
Au moment de jeter dans le flot noir des villes
Ces choses de mon cœur, gracieuses ou viles,
         Que boira le gouffre sans fond,
Ce gouffre aux mille voix où s’en vont toutes choses,
Et qui couvre d’oubli les tombes et les roses,
         Je me sens un...

 

J’ai voulu, le premier jour,
Vendre mes chansons d’amour ;
J’étais bien novice !
Ô mes dignes manuscrits,
L’épicier qui vous a pris
M’a rendu service.

Le second, j’ai, sur le quai,
Vendu mon couvert marqué,
Vieux meuble d’histoire,...

 
À M. Burgaud des Marets .

Quand un grand fleuve a fait trois ou quatre cents lieues,
Et longtemps promené ses eaux vertes ou bleues
Sous le ciel refroidi de l’ancien continent,
C’est un voyageur las, qui va d’un flot traînant.

Il n’a pas vu la mer,...

 
Entré dans ces jardins, l’homme s’y renouvelle ;
L’œil est plus clairvoyant, la nature est plus belle ;
On vient, tout est nouveau, rien ne semble inconnu ;
On l’avait dans le cœur, on s’en est souvenu.
La fleur qu’en d’autres champs on dédaignait la veille,...

Dans la forêt chauve et rouillée
Il ne reste plus au rameau
Qu’une pauvre feuille oubliée,
Rien qu’une feuille et qu’un oiseau.

Il ne reste plus dans mon âme
Qu’un seul amour pour y chanter,
Mais le vent d’automne qui brame
Ne permet pas de l’écouter...

 

Oui ! j’ai changé souvent de maîtresse et d’amours,
Mais, chaque fois, j’ai cru que c’était pour toujours ;
Et, jusqu’à l’âge mûr, j’ai connu la misère
De me duper moi-même, en me croyant sincère.
Ah ! dans cette heure exquise où le désir naissant
Et les...

 
I

Nous sommes sur les bords du Saint-Laurent sauvage.
Le fleuve, déployant l’orbe de son rivage,
En gracieux ovale épanche son flot pur.
Avec ses roseaux verts chantant comme une harpe,
La rive se déroule en amoureuse écharpe
Encadrant un miroir d’...