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    Nous sommes les Ingénues
    Aux bandeaux plats, à l’œil bleu,
    Qui vivons, presque inconnues,
    Dans les romans qu’on lit peu.

    Nous allons entrelacées,
    Et le jour n’est pas plus pur
    Que le fond de nos pensées,
    Et nos rêves sont d’azur ;

    Et nous courons par les prés
    Et rions et babillons
    Des aubes jusqu’aux vesprées,
    Et...

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    Ceux qui tiennent le soc, la truelle ou la lime,
    Sont plus heureux que vous, enfants de l’art sublime !
                Chaque jour les vient secourir
                Dans leurs quotidiennes misères ;
    Mais vous, les travailleurs pensifs aux mains légères,
                Vos ouvrages vous font mourir.
    L’austère paysan laboure pour les autres,
    Et ses rudes...

  • Bois chenus ! ah ! vent d’automne !
    L’oiseau fuit ! ah ! l’herbe est jaune !
    Le soleil ! ah ! s’est pâli !
    J’ai le cœur, ah ! bien rempli !

    Sous ma nef, ah ! l’eau moutonne,
    Et répond, ah ! monotone
    À mon chant, ah ! si joli.

    Quels regrets, ah ! l’amour donne !
    L’âge arrive, ah ! puis l’oubli !

    L’empereur Vou-Ti.

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    Proclamons les princip’s de l’art !
            Que tout l’mond’ s’épanche !
    Le marbre est un’ matière à part,
            Y en n’a pas d’plus blanche.

    Proclamons les princip’s de l’art !
             Que personn’ ne bouge !
    La terr’ glais’, c’est comm’ le homard ;
             Quand c’est cuit, c’est rouge.

    Proclamons les princip’s de l’art !...

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    J’aime tes yeux d’azur qui, tout pailletés d’or,
    Ont une lueur bleue et blonde,
    Tes yeux câlins et clairs où le rêve s’endort,
    Tes grands yeux bougeurs comme l’onde.

    Jusque dans leurs...

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    DANS la forêt que l’hiver navre
    J’allais silencieux et seul ;
    La lèvre était comme un cadavre
    Où la neige jette un linceul.

    Les dernières feuilles froissées
    Couraient sur le sol sans gazons
    Et, sur le deuil de mes pensées.
    Planait le deuil des horizons.

    Les grands arbres jaunes de mousse
    Pleuraient sur les lis défleuris.
    La...

  • Je suis la riante couronne,
    Le voile frais et parfumé
    Dont le front des bois s’environne
    Aux rayons du soleil de mai.

    Je suis la verte chevelure
    Qui, sur les branchages mouvants,
    Se joue, ondoyante parure,
    Aux caprices ailés des vents

    Avec moins de charme et de grâce
    Flottent, sur un cou virginal,
    Les longues tresses où s’enlace...

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    Petits serins, petits moineaux,
    Passez la tête à vos barreaux,
    Je viens des bois et de la plaine,
    De mouron frais ma hotte est pleine.

    Mouron ! mouron !
    Qui veut du mouron !

    Au long des prés et des ruisseaux,
    Des champs tout blonds aux verts coteaux,
    Parmi la mousse et la bruyère,
    Je vais cherchant la graine amère...

    ...

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    Sais-tu, mignonne ! la pervenche
    Émaille déjà les buissons,
    Et les oiseaux de branche en branche
    Disent tout joyeux leurs chansons.

    Partout se réveille la vie
    Sous les chauds rayons du soleil :
    C’est le printemps, il nous convie
    Ensemble à fêter son réveil.

    Viens ! nous irons, l’âme joyeuse,
    Porter nos pas bien loin, bien haut,...

  • QUAND nous serons couchés dans la tombe profonde,
    Ne crois pas, mon amour,
    Que nous aurons souci de revenir au monde
    Et de revoir le jour.

    Nous nous enivrerons d’une paix trop profonde,
    D’un silence trop doux,
    Pour nous laisser reprendre à l’angoisse du monde,
    Le calme étant sur nous.

    Ne me parle donc pas, charmeresse profonde,
    D’un...