•  
    O poète, pourquoi punir par ton silence
    Tant de cœurs malheureux à ta voix suspendus !
    D’un pouvoir corrupteur châtiant l’insolence,
    Rends au peuple indigné tes chants qui lui sont dus !
    Parmi ses défenseurs la Liberté te nomme.
    Viens de ses ennemis déjouer les complots.
    Lourde à tous, la tourmente est dans l’air, ô grand homme !
               Que...

  •  
    A ce cœur altéré d’amour et de lumière,
    O Dieu ! pourquoi n’offrir qu’un pain trempé de fiel ?
    Que ne l’as-tu fait naître en quelque humble chaumière
    Sur la haute montagne où l’on est près du ciel !
    Que ne lui donnas-tu, loin de la multitude,
    Avec un toit à l’ombre où cacher ses amours,
    Une Ève, âme des bois et de la solitude,
    Illuminant sa vie...

  •  
    Non loin de ton berceau pourquoi la Providence
    N'a-t-elle point caché le nid de mon enfance !
    Prodiguant tes clartés à mon ciel nuageux,
    Tu m'aurais partagé ta lumière et tes jeux ;
    Ta brise eût caressé ma tige encor débile ;
    Ton ombre eût abrité mon rêve humble et mobile ;
    Et la nuit, endormant notre bonheur pareil,
    Eût porté dans mon sein la...

  •  
    Si quelque jour ce livre, où ma pauvre âme en pleurs
    A la Muse a conté ses plus chères douleurs,
    Se trouvait sous vos mains, ouvrez-le : sous le voile
    Du symbole, à vos yeux se lèvera l’Étoile
    Dont le culte en mon cœur, culte unique et sacré,
    A grandi par l’épreuve et par l’âge épuré.
    Bien des jours ont passé depuis l’heure fatale
    Et bénie où...

  •  
    Il n’est plus ; et la foule - amère destinée ! -
    Vers ce mort, un moment, ne s’est point retournée,
    Et nul, les yeux voilés de larmes et de deuil,
    N’a ployé les genoux sur ce noble cercueil,
    Où de notre île, hélas ! descend dans l’indigence
    Le plus grand par le cœur et par l’intelligence.

    O pitié ! maintenant, dépensez donc vos jours
    Au culte...

  •  
    Source trois fois féconde, opulente Nature,
    Sans t’épuiser jamais, toi qui donnes toujours ;
    Toi qui répands à flots sur chaque créature
    La vie et ses bienfaits, la vie et ses beaux jours ;
    Je t’envie, ô Nature ! ô mère impérissable,
    Qui nous verses à tous un lait intarissable !
    Poète, que ne puis-je abreuver de mes chants,
    Comme toi de tes...

  •  
    Quand l'aigle, se berçant dans un essor sublime,
    Plane loin de la terre au séjour éthéré,
    Si son regard de roi descend sonder l'abîme
    Qui se creuse sous lui dans un vide azuré,
    A peine il aperçoit une crête élevée
    De ces monts, qui semblaient d'un front audacieux
    Porter du firmament la voûte soulevée ;
    Tant il est haut le roi des cieux !

    ...
  •  
    Un morne abattement pèse sur ma pensée.
    La vie hélas ! n’est point où je l’avais placée.
    L’illusion est vide et vide est le bonheur.
    L’amour ne suffit point à remplir notre cœur.
    Cherchant partout le Dieu, trouvant partout l’idole,
    Je change chaque jour d’autel et de symbole.
    L’ombre de l’Idéal, le fantôme du beau
    Me suit partout, armé du...

  •  
    O terre des palmiers, pays d'Eléonore,
    Qu'emplissent de leurs chants la mer et les oiseaux !
    Île des bengalis, des brises, de l'aurore !
    Lotus immaculé sortant du bleu des eaux !
    Svelte et suave enfant de la forte nature,
    Toi qui sur les contours de ta nudité pure,
    Libre, laisses rouler au vent ta chevelure,
    Vierge et belle aujourd'hui comme...

  •  
    Je puis mourir : j'ai dit, ô mon île natale !
    Ton ciel, tes monts, tes bois, tes champs, tes eaux, tes mers.
    Mon âme t'a payé sa dette filiale :
    Sur tes flancs de granit j'ai buriné mon vers.
    Chez moi ce n'est point l'art, c'est le cœur qui te chante.
    Ma piété pour toi fit ma voix plus touchante ;
    Mon cœur m'a révélé tes secrètes beautés.
    D'...