François Coppée

  • Quand on rentre, le soir, par la cité déserte,
    Regardant sur la boue humide, grasse et verte,
    Les longs sillons du gaz tous les jours moins nombreux,
    Souvent un chien perdu, tout crotté, morne, affreux,
    Un vrai chien de faubourg, que son trop pauvre maître
    Chassa d’...

  • Le cheval qu’a jadis réformé la remonte
    Est là, près du trottoir du long faubourg qui monte,
    Pour qu’on l’attelle en flèche au prochain omnibus.
    Il a cet air navré des animaux fourbus,
    Sous son sale harnais qui traîne par derrière.
    Mais lorsque, précédés d’une...

  • POUR L’ŒUVRE DU SOU DES CHAUMIERES

    Fléau rapide et qui dévore,
    La bataille a passé par là,
    Et la vieille maison brûla ;
    Regardez, cela fume encore.

    Quelques images d’Épinal,
    Un fusil sur la cheminée ;
    C’était la chaumière...

  •  

    I

    Sous le ciel d’hiver, bas et terne,
    Les gueux, les errants du trottoir,
    A la porte de la caserne
    Attendent la soupe du soir.

    Frissonnants sous la blouse bleue
    Ou sous le drap beaucoup trop mûr,
    Comme au théâtre ils font la queue,
    Deux...

  •  

    Du Volga sur leurs bidets grêles
    Les durs Baskirs vont arriver.
    Avril est la saison des grêles,
    Et les balles vont le prouver.

    Les neiges ont fini leurs fontes,
    Les champs sont verts d’épis nouveaux ;
    Mettons les pistolets aux fontes
    Et les...

  • Triste exilé, qu’il te souvienne
    Combien l’avenir était beau,
    Quand sa main tremblait dans la tienne
            Comme un oiseau,
     
    Et combien ton âme était pleine
    D’une bonne & douce chaleur,
    Quand tu respirais son haleine
            Comme une fleur...

  •  

    DES millions de fois les cieux sont centenaires.
    Nous sommes, fils d’Adam, pareils aux éphémères
    Dont les chauds tourbillons vibrent, l’été, dans l’air ;
    Et cent ans pleins de faits dans l’histoire du monde
    Ne durent, devant Dieu, qu’un souffle,...

  • Le silence imposant et la nuit solennelle
    Planent sur le rempart où, debout dans le vent,
    Le mousqueton au bras, veille une sentinelle
    Auprès d’un gros canon tourné vers le levant.

    Le fort est un de ceux qui virent le grand siége ;
    Et, jadis, quand sonna l’heure...

  •  
    Dans le bouge qu’emplit l’essaim insupportable
    Des mouches bourdonnant dans un chaud rayon d’août,
    L’ivrogne, un de ceux-là qu’un désespoir absout,
    Noyait au fond du vin son rêve détestable.

    Stupide, il remuait la bouche avec dégoût,
    Ainsi qu’un bœuf repu...

  •  
    Un maître, de qui la palette
    Se plaisait aux sombres couleurs,
    A peint un élégant squelette
    Portant un frais panier de fleurs.

    Près de lui la danse macabre,
    Comme les plis d’un noir drapeau,
    Ondoie ; et reîtres à grand sabre,
    Écoliers la pipe au...