François Coppée

  • Tout vit,tout aime ! et moi, triste et seul, je me dresse
    Ainsi qu’un arbre mort sur le ciel du printemps.
    Je ne peux plus aimer, moi qui n’ai que trente ans,
    Et je viens de quitter sans regrets ma maîtresse.

    Je suis comme un malade aux pensers assoupis
    Et qui,...

  • À Henry Cazalis.

    L’immense ennui, ce fils bâtard de la douleur,
    En maître est installé dans mon âme et l’habite,
    Et moins que la vieillesse affreuse et décrépite,
    Cette âme de trente ans a gardé de chaleur.

    J’en atteste ces...

  •  

    Oui ! j’ai changé souvent de maîtresse et d’amours,
    Mais, chaque fois, j’ai cru que c’était pour toujours ;
    Et, jusqu’à l’âge mûr, j’ai connu la misère
    De me duper moi-même, en me croyant sincère.
    Ah ! dans cette heure exquise où le désir naissant
    Et les...

  •  
    Dans le faubourg planté d’arbustes rabougris,
    Où le pâle chardon pousse au bord des murs gris,
    Sur le trottoir pavé que limitent des bornes,
    Lentement, en grand deuil tous deux, tristes et mornes,
    Et vers le couchant d’or d’un juillet étouffant,
    Vont...

  •  
    Le train stoppa ; c’était la station de Sèvres.

    Assis dans mon wagon, la cigarette aux lèvres,
    En jetant un regard dehors, je remarquai,
    Près de la porte en bois ouverte sur le quai,
    Un groupe de trois sœurs vraiment presque pareilles :
    Mêmes cheveux au...

  • À Jules Bonnassies.

    Les deux petites sont en deuil ;
    Et la plus grande, – c’est la mère, –
    A conduit l’autre jusqu’au seuil
    Qui mène à l’école primaire.

    Elle inspecte, dans le panier,
    Les tartines de confiture
    Et...

  • À Jules Christophe.

    L’homme, en manches de veste et, sous son chapeau noir,
    A cause du soleil, ayant mis son mouchoir,
    Tire gaillardement la petite voiture,
    Pour faire prendre l’air à sa progéniture,
    Deux bébés, l’un qui dort, l...

  •  

    Ainsi qu’un malheureux, le corps frileux et gourd,
    Tâche de se chauffer en soufflant sur des braises,
    L’amer couchant d’octobre, au lointain du faubourg,
    A fait flamboyer ses fournaises.

    Dans les squelettes noirs des arbres nus et droits,
    Le vent du soir,...

  •  

    DEPUIS plus de quinze ans, le nommé Marc Lefort
    Est mécanicien sur la ligne du Nord.
    Naguère bon sujet, adroit, exact, honnête,
    Il fut toujours noté pourtant « mauvaise tête » ;
    Car il se nourrissait d’un journal rouge-sang,
    Qu’il supposait...

  •  

    Souvent, libertin lassé de mon rôle,
    J’ai feint un amour à peine éprouvé.
    Mais tu m’as guéri, mais je suis sauvé,
    Depuis que je dors sur ta jeune épaule.

    C’est un sentiment si frais et si pur,
    C’est comme une fleur dans mon âme éclose,
    Lorsque...