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    Depuis longtemps, épris des choses du passé,
    Dans votre noble cœur vous aviez caressé
    L’espoir de contempler les forêts et les grèves
    Où, poursuivant toujours son rôle glorieux,
    Durant un siècle entier, la France des aïeux,
    Pour fonder un empire, a combattu sans trêves.

    Vous rêviez d’aborder aux rivages ombreux
    Arrosés tant de fois par le sang...

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    Nous aimons exalter, nous exaltons souvent
    Les preux qui, tout sanglants, pleins d’ardeur obstinée,
    Auprès d’un fier drapeau gonflant ses plis au vent,
    Succombent au milieu d’une charge effrénée ;
    Mais toujours nous passons indifférents devant
    Ceux qui luttent sans bruit contre la destinée.

    Nous avons des sanglots, nous avons des lauriers
    ...

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    L’Histoire n’a jamais, les yeux rougis de pleurs,
    Narré plus durs revers et plus longues douleurs,
    Enfantés par la guerre et par la perfidie,
    Que ceux qui tant de fois courbèrent les héros
    Dont tu nous as si bien rappelé les sanglots,
    Ô noble descendant de la noble Acadie !

    L’Histoire n’a jamais sur des feuillets d’airain
    Gravé de son austère...

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    Or, pendant que Jésus soupait, à Béthanie,
    Entouré de fervents, chez Simon le lépreux,
    Madeleine franchit le seuil du malheureux,
    Et, souriant avec une grâce infinie
    Au Christ qui lui montrait de son regard les cieux,
    Elle baigna son front d’un parfum précieux.

    Cette profusion indigna les apôtres.
    — Nous pouvions, disaient-ils, vendre cher ce...

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    Enfant, as-tu trouvé de l’amertume au fond
    Du vase éblouissant qui te versait la vie,
    Que tu viens d’écarter tout à coup ton beau front
    De la foule où naguère on te voyait ravie ?

    Si jeune encore, as-tu déjà fait des ingrats ?
    As-tu vu s’envoler quelque illusion blonde ?
    Le sort ne veut-il plus te bercer dans ses bras ?
    Oh ! dis-moi donc...

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    Comme l’oiseau frileux qui s’enfuit à l’automne,
    Vous nous avez quittés quand octobre est venu,
    Alors qu’à nos carreaux la bise monotone
    Pleurait en secouant les bras de l’arbre nu.

    Vous envoler, c’était faire envoler la joie
    Qu’en passant vous laissiez tomber sur chaque seuil,
    C’était rendre plus morne encor mon front qui ploie ;
    Dans nos...

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    I

    Avant de terminer, mère, un dernier volume,
    Je suis venu, d’un pas ému, te l’apporter.
    Mère, au bord de ta fosse, où l’oiseau vient chanter,
    Sens-tu mon pied fouler le sol que mai parfume ?…

    Mère, dans ton cercueil, reconnais-tu ma voix ?…
    Avant d’ouvrir mon livre au grand souffle des cimes,
    Je suis venu t’offrir l’hommage de ces rimes,...

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    Souvent, lorsque la nuit de mai pâle et pensive
    Envahit les grands flots du Fleuve qui s’endort,
    Écartant de la main la branche ou l’ajonc d’or,
    Je vais, distrait, fouler le sable de la rive.

    Tour à tour l’œil au ciel et sur l’eau fugitive
    Qui reflète en son calme azur les pins du Nord,
    J’aime à voir vers le sud cingler la nef massive
    Dont l’...

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    Depuis que l’on me vit en pleurs parmi des marbres,
    Dans l’ombre des caveaux et l’ombre des cyprès,
    Cinq fois le vent d’automne a dépouillé les arbres,
    La neige a blanchi les forêts.

    Cinq fois le doux printemps a réchauffé la pierre
    Et rendu chants et joie au bosquet endormi,
    Depuis que tu fermas à jamais ta paupière,
    O mon père ! ô mon guide...

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    Quand l’archet palpitant fait ruisseler les sons
    Du stradivarius pressé sur ta poitrine,
    Il coule de ton bras comme une onde divine
    Qui jette dans les cœurs de sublimes frissons.

    Tour à tour sous tes doigts gazouillent les pinsons,
    Les épis des blés d’or, la source cristalline,
    Les bruits mystérieux de la conque marine,
    La harpe des roseaux,...