•  
    Muses ! vous savez tout, vous Déesses ; et nous,
    Mortels, ne savons rien qui ne vienne de vous.
    ANDRÉ CHÉNIER.

     

    Messager discret et fidèle,
    Dit un jour Amour au Zéphir,
    Je veux étonner l’avenir
    Du prix que j’accorde à ton zèle !
    A mes yeux tu l’as mérité,
    Quand j’ai vu mes aveux timides
    Et les soupirs de la...

  • VIII

    Tu viens d'incendier la Bibliothèque ? - Oui.
    J'ai mis le feu là. - Mais c'est un crime inouï !
    Crime commis par toi contre toi-même, infâme !
    Mais tu viens de tuer le rayon de ton âme !
    C'est ton propre flambeau que tu viens de souffler !
    Ce que ta rage impie et folle ose brûler,
    C'est ton bien, ton trésor, ta dot, ton...

  • IX

    Sachez-le, puisqu'il faut, Teutons, qu'on vous l'apprenne,
    Non, vous ne prendrez pas l'Alsace et la Lorraine,
    Et c'est nous qui prendrons l'Allemagne. Ecoutez :
    Franchir notre frontière, entrer dans nos cités,
    Voir chez nous les esprits marcher, lire nos livres,
    Respirer l'air profond dont nos penseurs sont ivres,
    C'est...

  •  
          À qui rêves-tu si tu rêve,
    Front bombé que j’adore et voudrais entr’ouvrir,
    Entr’ouvrir d’un baiser pénétrant comme un glaive,
    Pour voir si c’est à moi, — que tu fais tant souffrir !
    O front idolâtré, mais fermé, — noir mystère,
    Plus noir que ces yeux noirs qui font la Nuit en moi,
    Et dont le sombre feu nourrit et désespère
          L’amour...

  •  
    Madame, je pourrais vous dire
    Que vos beaux yeux
    Que chacun avec crainte admire
    Sont plus azurés que les cieux
    Mais à quoi bon ? Vous ne feriez qu’en rire.

    Je pourrais vous dire bien bas
    Que tous vos charmes
    Que tous vos merveilleux appas
    Ont souvent fait couler des larmes ;
    Mais à quoi bon ? Vous ne le croiriez pas.

    Enfin,...

  •  
    A quoi bon revenir encore avec envie
    Au souvenir des lieux que nous avons quittés !
    Que nous fait le pays où coule notre vie ?
    La nature partout a les mêmes beautés.

    Pourvu qu’un coin du ciel sur notre tête brille,
    Pourvu qu’un arbre vert ombrage notre seuil,
    Que le soir, en rentrant, une douce famille
    Nous réchauffe le cœur par son joyeux...

  • XXIII

    À quoi je songe ? — Hélas ! loin du toit où vous êtes,
    Enfants, je songe à vous ! à vous, mes jeunes têtes,
    Espoir de mon été déjà penchant et mûr,
    Rameaux dont, tous les ans, l’ombre croît sur mon mur,
    Douces âmes à peine au...

  •  
    À quoi pense la Nuit, quand l’âme des marais
    Monte dans les airs blancs sur tant de voix étranges,
    Et qu’avec des sanglots qui font pleurer les anges
    Le rossignol module au milieu des forêts ?…

    À quoi pense la Nuit, lorsque le ver luisant
    Allume dans les creux des frissons d’émeraude,
    Quand murmure et parfum, comme un zéphyr qui rôde,
    ...

  •  
          Lorsque avec les sons
          Dont tu les complètes,
          Tu fais des chansons
          De mes odelettes,
          Mille aspects divers
          De grâce physique
          Naissent dans mes vers
          Avec ta musique !

          A ta seule voix,
          Tout en eux s’éveille
          Et vit à la fois.
          O rare merveille !...

  •  
          Ce temps est si sévère
               Qu’on n’ose pas
          Remplir deux fois son verre
               Dans un repas,

          Ni céder à l’ivresse
               De son désir,
          Ni chanter sa maîtresse
               Et le plaisir !

          On croit que, pour paraître
               Rempli d’orgueil,
          Il est distingué d’être...