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    Les baigneurs somnolents se traînent sur la grève,
    Les membres harassés, l’esprit en désarroi.
    Quelque chose leur pèse, ils ne savent trop quoi.
    Ils ne sont pas chez eux dans ce pays du rêve.

    L’un dit : – Ce n’est pas gai, cet éternel brouillard.
    La mer ? Eh oui, je vois. Mais ça ne compte guère.
    L’autre : – Votre journal parle-t-il de la guerre ?...

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    O mère ! si les yeux de ton fils bien aimé
    Brillent de l’éclat du génie ;
    Si déjà sur son front, à ton regard charmé,
    Paraît l’antique honneur de sa noble pairie ;
    Si de ses compagnons quittant l’essaim joyeux,
    Il demande au vieillard ses chansons vénérées ;
    Ou si des temps passés, tous pleins de ses aïeux,
    Il écoute, pensif, les annales...

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    Mère du Polonais ! lorsque tu vois la trace
    Du génie ennoblir le regard de ton fils ;
    Quand son front juvénile a rayonné d’audace,
    Tu reconnais le sang des héros du pays.

    Et quand, morne, inclinant sa tête intelligente
    Il fuit ses compagnons et déserte leurs jeux
    Pour écouter la voix du vieillard qui lui chante
    Le surprenant récit des hauts...

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    Prends, s’il le faut, docteur, les ailes de Mercure
    Pour m’apporter plus tôt ton baume précieux !
    Le moment est venu de faire la piqûre
    Qui, de ce lit d’enfer, m’enlève vers les cieux.

    Merci, docteur, merci ! qu’importe que la cure
    Maintenant se prolonge en des jours ennuyeux !
    Le divin baume est là, si divin qu’Epicure
    Aurait dû l’inventer...

  • Je n'ai pas renié la Lyre. Je puis boire
    Encor dans la fontaine à la profondeur noire,
    Où le Rhythme soupire avec les flots divins.
    Ô Déesse, j'étais un enfant quand tu vins
    Pour la première fois baiser ma chevelure.
    J'étais comme un avril en fleur. Nulle souillure
    Ne tachait la fierté de mon cœur ingénu.
    Plus de vingt ans se sont passés : mon front...

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    Phipps bombardait Québec. Du haut de son nid d’aigle,
    Frontenac tenait ferme et ripostait en règle.

    La veille, un envoyé de l’amiral anglais
    Avait, signaux en mains, pris pied sur les galets
    Où du Cap Diamant l’escarpement se dresse,
    Et, porteur d’un message insolent dont l’adresse
    Ne dissimulait point l’orgueilleuse teneur,
    S’était fait...

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    Source trois fois féconde, opulente Nature,
    Sans t’épuiser jamais, toi qui donnes toujours ;
    Toi qui répands à flots sur chaque créature
    La vie et ses bienfaits, la vie et ses beaux jours ;
    Je t’envie, ô Nature ! ô mère impérissable,
    Qui nous verses à tous un lait intarissable !
    Poète, que ne puis-je abreuver de mes chants,
    Comme toi de tes...

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    I

    Que t’importe d’entrer dans la terre promise,
    Si tu vois sur ses tours nos drapeau triomphants ;
    Si du haut de l’Horeb tu peux, arec Moïse,
    Montrer d’un doigt certain la route à nos enfants ;

    Si tu sais, dans ta foi, qu’une vertu se fonde,
    Que ton dernier combat fut gagné sur le mal,
    Que ta race et ton Dieu régneront sur le monde,
    Que...

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    Astre demi-caché, mystérieuse étoile !
    Idole du génie et de la vérité,
    Quelle es-tu ? — Sous quels cieux te montres-tu sans voile ?
    Qui te voit dans ta grâce et dans ta nudité ?

    Le bien , le vrai, le beau, perfection suprême !
    Sous tous ces noms divers on t'adore en tout lieu,
    Depuis le sage allier qui te cherche en lui-même,
    Jusqu'à l'humble...