Alfred de Musset

  • Sonnet

    Ainsi, quand la fleur printanière
    Dans les bois va s'épanouir,
    Au premier souffle du zéphyr
    Elle sourit avec mystère ;

    Et sa tige fraîche et légère,
    Sentant son calice s'ouvrir,
    Jusque dans le sein de la terre
    Frémit de joie et de désir...

  • Oui, si j'étais femme, aimable et jolie,
    Je voudrais, Julie,
    Faire comme vous ;
    Sans peur ni pitié, sans choix ni mystère,
    A toute la terre
    Faire les yeux doux.

    Je voudrais n'avoir de soucis au monde
    Que ma taille ronde,
    Mes chiffons chéris,...

  • Vous m'envoyez, belle Emilie,
    Un poulet bien emmailloté ;
    Votre main discrète et polie
    L'a soigneusement cacheté.
    Mais l'aumône est un peu légère,
    Et malgré sa dextérité,
    Cette main est bien ménagère
    Dans ses actes de charité.
    C'est regarder à la dépense...

  • Non, quand bien même une amère souffrance
    Dans ce coeur mort pourrait se ranimer ;
    Non, quand bien même une fleur d'espérance
    Sur mon chemin pourrait encor germer ;

    Quand la pudeur, la grâce et l'innocence
    Viendraient en toi me plaindre et me charmer,
    Non,...

  • Que j'aime le premier frisson d'hiver ! le chaume,
    Sous le pied du chasseur, refusant de ployer !
    Quand vient la pie aux champs que le foin vert embaume,
    Au fond du vieux château s'éveille le foyer ;

    C'est le temps de la ville. - Oh ! lorsque l'an dernier,
    J'y...

  • Sonnet

    Sous ces arbres chéris, où j'allais à mon tour
    Pour cueillir, en passant, seul, un brin de verveine,
    Sous ces arbres charmants où votre fraîche haleine
    Disputait au printemps tous les parfums du jour ;

    Des enfants étaient là qui jouaient alentour...

  • Elle a mis, depuis que je l'aime
    (Bien longtemps, peut-être toujours),
    Bien des robes, jamais la même ;
    Palmire a dû compter les jours.

    Mais, quand vous êtes revenue,
    Votre bras léger sur le mien,
    Il faisait, dans cette avenue,
    Un froid de loup, un...

  • Oui, femmes, quoi qu'on puisse dire,
    Vous avez le fatal pouvoir
    De nous jeter par un sourire
    Dans l'ivresse ou le désespoir.

    Oui, deux mots, le silence même,
    Un regard distrait ou moqueur,
    Peuvent donner à qui vous aime
    Un coup de poignard dans le coeur....

  • C'est mon avis qu'en route on s'expose à la pluie,
    Au vent, à la poussière, et qu'on peut, le matin,
    S'éveiller chiffonnée avec un mauvais teint,
    Et qu'à la longue, en poste, un tête-à-tête ennuie.

    C'est mon avis qu'au monde il n'est pire folie
    Que d'embarquer l'...

  • I

    Le carnaval s'en va, les roses vont éclore ;
    Sur les flancs des coteaux déjà court le gazon.
    Cependant du plaisir la frileuse saison
    Sous ses grelots légers rit et voltige encore,
    Tandis que, soulevant les voiles de l'aurore,
    Le Printemps inquiet paraît...