Confiance

 

Souvent, libertin lassé de mon rôle,
J’ai feint un amour à peine éprouvé.
Mais tu m’as guéri, mais je suis sauvé,
Depuis que je dors sur ta jeune épaule.

C’est un sentiment si frais et si pur,
C’est comme une fleur dans mon âme éclose,
Lorsque tendrement ma tête repose
Sur ton humble cœur dont je suis bien sûr.

Je vieillis, j’ai fait deux tiers du voyage ;
Mais si, quelquefois, j’en suis attristé,
Cela passe vite, ainsi qu’en été
Glisse sur les champs l’ombre d’un nuage ;

Car j’ai mon bonheur sincère et permis,
Car je suis certain, ô chère maîtresse,
Que bientôt, hélas ! quand fuira l’ivresse,
Nous serons encor de bons vieux amis...

Et c’est pour jamais ! Et, chauds et fidèles,
Mes derniers désirs vont vers ton amour,
Comme, dans le ciel d’un dernier beau jour,
S’attarde et tournoie un vol d’hirondelles.

Collection: 
1862

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O poète trop prompt à te laisser charmer,
Si cette douce enfant devait t'être ravie,
Et si ce coeur en qui tout le tien se confie
Ne pouvait pas pour toi frémir et s'animer ?

N'importe ! ses yeux seuls ont su faire germer
Dans mon âme si lasse et de tout assouvie...

J'écris près de la lampe. Il fait bon. Rien ne bouge.
Toute petite, en noir, dans le grand fauteuil rouge,
Tranquille auprès du feu, ma vieille mère est là ;
Elle songe sans doute au mal qui m'exila
Loin d'elle, l'autre hiver, mais sans trop d'épouvante,
Car je suis...

Champêtres et lointains quartiers, je vous préfère
Sans doute par les nuits d'été, quand l'atmosphère
S'emplit de l'odeur forte et tiède des jardins ;
Mais j'aime aussi vos bals en plein vent d'où, soudains,
S'échappent les éclats de rire à pleine bouche,
Les polkas...

Songes-tu parfois, bien-aimée,
Assise près du foyer clair,
Lorsque sous la porte fermée
Gémit la bise de l'hiver,

Qu'après cette automne clémente,
Les oiseaux, cher peuple étourdi,
Trop tard, par un jour de tourmente,
Ont pris leur vol vers le Midi ;...

Captif de l'hiver dans ma chambre
Et las de tant d'espoirs menteurs,
Je vois dans un ciel de novembre,
Partir les derniers migrateurs.

Ils souffrent bien sous cette pluie ;
Mais, au pays ensoleillé,
Je songe qu'un rayon essuie
Et réchauffe l'oiseau...