• Pendant les guerres de l’Empire,
    Gœthe, au bruit du canon brutal,
    Fit Le Divan occidental,
    Fraîche oasis où l’art respire.

    Pour Nisami quittant Shakspeare,
    Il se parfuma de santal,
    Et sur un mètre oriental
    Nota le chant qu’Hudhud soupire.

    Comme Gœthe sur son divan
    À Weimar s’isolait des choses
    Et d’Hafiz effeuillait les...

  •  
    Les vieux égyptiens vénéraient fort les morts ;
    Ils avaient même l’art de soustraire les corps
    Au travail dévorant de la faux de Saturne.
    Ils ne les mettaient point en cendres, dans une urne,
    Comme le pratiquaient les austères Romains ;
    Mais, les débarrassant des organes humains
    Corruptibles, de baume et de fins aromates
    Ils les bourraient et,...

  •  
    Vision de forêts dans l’eau glauque - Émeraude.
    Étangs luisant dans les jardins comme des yeux,
    Beaux yeux cruels pareils aux bois mystérieux
    Où la panthère d’or, amour, ondule et rôde.

    Printemps de la couleur. Rêve sentimental
    De feuillée en fraîcheur mirée à la rivière
    Et d’âme rebaignée en la candeur première
    De la verdure peinte en un...

  •  
    Comme un vent orageux, des bruits rauques et sourds
    Roulent soudainement de faubourgs en faubourgs ;
    Les portes des maisons, les fenêtres frémissent,
    Les marteaux sur le bronze à grands coups retentissent,
    La peur frappe partout, et les vieillards tremblants,
    Les femmes en désordre, et les petits enfants,
    D’un grand œil étonné regardant ce qui passe...

  • Il fait nuit. – Et la voûte est ténébreuse où monte,
    Par la sonorité du bâtiment de fonte,
    Le jet de vapeur blanche au sifflement d’enfer,
    Hennissement affreux du lourd cheval de fer
    Qui vient à reculons et lui-même s’attelle,
    Avec un bruit strident d’enclume qu’on martèle,
    Au long train des wagons béants le long du quai.
    Attirés par ce bruit de fer...

  • Ô pauvres insensés, quittant votre chaumière,
    Pour courir, acharnés, vers un but inconnu.
    Bretons, croyez-vous donc que la Ville Lumière
    Soit un paisible abri pour un cœur éperdu ?

    Croyez-vous que Paris entendra la prière
    Qu’élèvera vers lui un pauvre être déçu ?…
    Gardez-vous de glisser, car profonde est l’ornière,
    Quiconque y trébucha fut un homme...

  •  
    Le couchant répandra la neige des opales,
    Et l’air sera chargé d’odeurs orientales.

    Les caïques furtifs jetteront leur éclair
    De poissons argentins qui traversent la mer.

    Ce sera le hasard qu’on aime et qu’on redoute…
    A pas lents, mon destin marchera sur la route.

    Je le reconnaîtrai parmi les inconnus
    Malgré les ciels changés et les temps...

  • Les bêches qui s’en vont aux champs

    Sur l’épaule des paysans,
    Au long des clos et des chaumières
    Brillent gaîment dans le matin
    Et, sous le ciel, ainsi que des miroirs lointains,
    Réverbèrent des carrés d’or de bougeante lumière.
    Le givre clair a disparu du sol ;
    Une lente et douce fumée
    Monte, comme un encens...

  •  
    Sur des bancs de bois, dans la basse taverne sombre,
    Où le jour pénètre à travers les vitres sales,
    Autour de longues tables, était assise, triste,
    Une bande errante, faces assombries,
    Enfants pauvres et sceptiques de la plèbe prolétaire.

    Ah ! s’exclamait l’un, vous dites que l’homme est une lumière
    Sur ce monde plein d’amertumes et de torture ?...

  • Oui, c’est une montée âpre, longue et poudreuse,
    Un revers décharné, vrai site de chartreuse.
    Les pierres du chemin, qui croulent sous les pieds,
    Trompent à chaque instant les pas mal appuyés.
    Pas un brin d’herbe vert, pas une teinte fraîche ;
    On ne voit que des murs bâtis en pierre sèche,
    Des groupes contrefaits d’oliviers rabougris
    Au feuillage...