•  
    J’ai puérilisé mon cœur dans l’innocence
    De notre amour, éveil de calice enchanté.
    Dans les jardins où se parfume le silence,
    Où le rire fêlé retrouve l’innocence,
    Ma Douce ! je t’adore avec simplicité.

    Tes doigts se sont noués autour de mon cœur rude.
    Et un balbutiement pareil au cri naïf
    De l’inexpérience et de la gratitude,
    Je te...

  •  
    Une odeur fraîche, un bruit de musique étouffée
    Sous les feuilles, et c’est Viviane la fée.

    Elle imite, cachée en un fouillis de fleurs,
    Le rire suraigu des oiseaux persifleurs.

    Souveraine fantasque, elle s’attarde et rôde
    Dans la forêt, comme en un palais d’émeraude.

    L’eau qui miroite a la couleur de son regard.
    Elle se voile des dentelles...

  •  
    Un morne abattement pèse sur ma pensée.
    La vie hélas ! n’est point où je l’avais placée.
    L’illusion est vide et vide est le bonheur.
    L’amour ne suffit point à remplir notre cœur.
    Cherchant partout le Dieu, trouvant partout l’idole,
    Je change chaque jour d’autel et de symbole.
    L’ombre de l’Idéal, le fantôme du beau
    Me suit partout, armé du...

  •  
    Ile charmante et douce, ô Jersey ! Qu’en dis-tu ?
    Voilà vingt ans, ton port par les vagues battu,
    Accueillait des proscrits qui t’arrivaient de France.
    Leurs fronts plissés mais non courbés par la souffrance,
    Convenaient aux soldats de notre liberté.
    Ils ne t’abusaient pas. Leur fière pauvreté
    Demandait au travail de payer ton asile.
    À ces...

  •  
    O terre des palmiers, pays d'Eléonore,
    Qu'emplissent de leurs chants la mer et les oiseaux !
    Île des bengalis, des brises, de l'aurore !
    Lotus immaculé sortant du bleu des eaux !
    Svelte et suave enfant de la forte nature,
    Toi qui sur les contours de ta nudité pure,
    Libre, laisses rouler au vent ta chevelure,
    Vierge et belle aujourd'hui comme...

  •  
    Je puis mourir : j'ai dit, ô mon île natale !
    Ton ciel, tes monts, tes bois, tes champs, tes eaux, tes mers.
    Mon âme t'a payé sa dette filiale :
    Sur tes flancs de granit j'ai buriné mon vers.
    Chez moi ce n'est point l'art, c'est le cœur qui te chante.
    Ma piété pour toi fit ma voix plus touchante ;
    Mon cœur m'a révélé tes secrètes beautés.
    D'...

  • Suave et pur jasmin d’Espagne
    Où se posa l’abeille d’or,
    Une grâce vous accompagne,
    Et vous possédez un trésor ;

    Vous, le sourire de la force,
    Le charme de la majesté,
    Vous avez la puissante amorce
    Qui prend les âmes — la bonté !

    Et, derrière l’Impératrice
    À la couronne de rayons,
    Apparaît la consolatrice
    De toutes les...

  •  
    Es-tu femme ou statue ? Hélas ! j’ai beau m’user
    Par les raffinements inouïs que j’invente
    Pour forcer ta chair morte à devenir vivante,
    J’ai beau me convulser sur ta gorge énervante,
    Tu n’as jamais senti la luxure savante
    De mon baiser.

    Ainsi donc, comme un plomb...

  •  
    (Ode IX, liv. IV)

    Modulés sur un rythme à nul autre emprunté,
    Mes chants retentiront dans la postérité ;
    L’Aufide l’a promis à mon heureuse aurore :
    Je suis né près des flots dont le fracas sonore,
    Dans le déclin des jours par la brise emporté,
    Des horizons lointains emplit l’immensité.

    Pindare, Simonide, Alcée et Sthésicore...

  •  

    Sur une traduction qu’il avait faite
    d’un poème anglais.

    COMME vous maniez le dur alexandrin,
    Maître ! Grand forgeron, dites, sur quelle enclume,
    Avec le merveilleux marteau de votre plume,
    Forgez-vous ces beaux vers souples, quoique d’airain ?

    Sans doute que Ronsard, l’ouvrier souverain,
    Lorsque pour le labeur sacré le feu s’...