• Ô nocturnes rôdeurs aux courses vagabondes,
    Dont l’aube pâle fait clignoter les yeux roux,
    Et qui dormez le jour, dans l’ombre de vos trous,
    Quand les soleils font flamboyer les plaines blondes,

    Lorsque vos dents claquaient pour vos festins immondes,
    Quand la faim hérissait vos poils comme des clous,
    Ô chacals, déterreurs sinistres, dites-nous
    Si...

  • Chacun en sa beauté vante ce qui le touche ;
    L’amant voit des attraits où n’en voit point l’époux ;
    Mais que d’autres, narguant les sarcasmes jaloux,
    Vantent un poil follet au-dessus d’une bouche ;

    D’autres, sur des seins blancs un point comme une mouche ;
    D’autres, des cils bien noirs à des yeux bleus bien doux,
    Ou sur un cou de lait des cheveux d’un...

  • Chacun le mieus qu’il peut souffre en l’hostellerie
    Les incommoditez d’une mauvaise nuit,
    Resou de s’en aller au premier jour qui suit,
    Dormir en sa maison sans crainte et fascherie.

    Endure constamment la haine et la furie,
    Les tavaus et tourment de ce monde seduit,
    Sçachant bien que demain tu vivras en desduit
    En la cité de Dieu, recou de Samarie....

  •  
    Les lignes du labour dans les champs en automne
    Fatiguent l’œil, qu’à peine un toit fumant distrait,
    Et la voûte du ciel tout entière apparaît,
    Bornant d’un cercle nu la plaine monotone.

    En des âges perdus dont la vieillesse étonne
    Là même a dû grandir une vierge forêt,
    Où le chant des oiseaux sonore et pur vibrait,
    Avec l’hymne qu’au vent le...

  •  
    C'est un usage encor dans nos pieux rochers :
    Aux approches du soir, quand les jeunes vachers
    Ramènent en sifflant leurs troupeaux à l'étable,
    Ces enfants croiraient faire une action coupable
    S'ils éteignaient alors la braise du tison
    Qui fuma tout le jour dans le creux d'un buisson.
    Durant la nuit, qui sait si l'âme d'un vieux pâtre
    Ne viendra...

  •  
    L’aigle, malgré l’ardeur qui fait mouvoir son aile,
    N’atteint pas le soleil que cherche sa prunelle,
    Et l’astre d’or s’en va dans l’abîme inconnu,
    Comme un roi qui descend les marches de son trône,
    Le front ceint d’une immense et superbe couronne,
    Avant que jusqu’à lui l’oiseau soit parvenu.

    Il a dû s’arrêter dans cette course altière,
    A l’...

  •  
    La chair de femme sèche ou grasse
    Est le fruit de la volupté
    Tour à tour vert, mûr et gâté
    Que le désir cueille ou ramasse.

    Mystérieuse dans sa grâce,
    Exquise dans son âcreté,
    La chair de femme sèche ou grasse
    Est le fruit de la volupté.

    Pas un seul homme ne s’en lasse.
    Chacun avec avidité
    Y mordrait pour l’éternité.
    ...

  •  
        Je possède, en mes doigts subtils, le sens du monde,
        Car le toucher pénètre ainsi que fait la voix.
        L’harmonie et le songe et la douleur profonde
        Frémissent longuement sur le bout de mes doigts.

        Je comprends mieux, en les frôlant, les choses belles,
        Je partage leur vie intense en les touchant.
        C’est alors que je sais ce...

  •      Talenz me prist de remembrer
    [Bl. 170b] un lai dunt jo oï parler.
    L’aventure vus en dirai
    e la cité vus numerai
    5u il fu nez, e cum ot nun.
    ’Le...

  •  
    Ma chambre est pareille à mon âme,
    Comme la mort l’est au sommeil :
    Au fond de l’âtre, pas de flamme
    À la vitre, pas de soleil !

    Les murailles sont recouvertes
    D’un lamentable papier gris
    Où l’ombre des persiennes vertes
    Met des taches de vert-de-gris.

    Au-dessus de mon chevet sombre
    Pend un Christ à l’air ingénu,
    Qui semble...