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    En un fauteuil sculpté de son salon ducal,
    La noble Viennoise, en gaze violette,
    De ses doigts ivoirins, pieusement feuillette.
    Le vélin s’élimant d’un missel monacal.

    Et sa mémoire évoque, en rêve musical,
    Ce pauvre guitariste aux yeux où se reflète
    Le pur amour de l’art, qui, près de tablette
    Venait causer, humant des fleurs dans un bocal...

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    Balzac est parmi nous le grand poète en prose,
    Et jamais nul esprit sondeur du gouffre humain,
    N’a fouillé plus avant la moderne névrose,
    Ni gravi dans l’Art pur un plus âpre chemin.

    D’un siècle froid, chercheur, hystérique et morose
    Il a scruté le ventre et disséqué la main ;
    Et son œuvre est un parc sensitif où la rose
    Fait avec l’asphodèle...

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    ...

  • Lorsque je vais m’asseoir à mon banc favori,
    Qu’il est tard, qu’il fait doux, que selon l’habitude
    Mon petit chien me garde avec sollicitude,
    Tous les songes aimés dont mon cœur s’est nourri
    Reviennent à la fois peupler ma solitude.

    C’est comme un bruit lointain de rires & de chants
    Qui vibre encor dans ma mémoire trop fidèle ;
    C’est comme un vol...

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    Non loin du piédestal où j’étais accoudé,
    A l’ombre d’un Sylvain de marbre démodé
    Et sur un banc perdu du jardin solitaire,
    Je vis une servante auprès d’un militaire.

    Ils se tenaient tous deux assis à chaque coin
    Du banc, et se parlaient doucement, mais de loin,
    ― Attitude où l’amour jeune est reconnaissable. ―
    A leurs pieds un enfant jouait...

  • À ERNEST HÉBERT

    Au fond du parc, dans une ombre indécise,
    Il est un banc, solitaire et moussu,
    Où l’on croit voir la Rêverie assise,
    Triste et songeant à quelque amour déçu.
    Le Souvenir dans les arbres murmure,
    Se racontant les bonheurs expiés ;
    Et, comme un pleur, de la grêle ramure
          Une feuille tombe à vos pieds.

    ...

  • IV

    Qu'est-ce que cela fait à cette grande France ?
    Son tragique dédain va jusqu'à l'ignorance.
    Elle existe, et ne sait ce que dit d'elle un tas
    D'inconnus, chez les rois ou dans les galetas ;
    Soyez un va-nu-pieds ou soyez un ministre,
    Vous n'avez point du mal la majesté sinistre ;
    Vous bourdonnez en vain sur son éternité....

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    Cynthée, Athénien proscrit, disait ceci :
    Un jour, moi Cynthœus et Méphialte aussi,
    Tous deux exilés, lui de Sparte, moi d'Athènes,
    Nous suivions le sentier que voici dans les plaines,
    Car on nous a bannis au désert de Thryos.
    Un bruit pareil au bruit de mille chariots,
    Un fracas comme en peut faire un million d'hommes,
    S'éleva tout à coup dans...

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    « Enfants, dit le démon, notre siècle s’approche ;
    » Il faut s’y préparer ; écoutez cette cloche ;
    » Je vous annonce, amis, qu’il n’est plus de retour.
    » Déjà marche à grands pas le soir du dernier jour.
    » Mais comme de ma joie il reste une étincelle,
    » J’invite à mon banquet mon...

  • Le banquet des Gueux

    La joie
    Des yeux qui voient
    S’emplir, jusques aux bords,
    Les hanaps d’or
    Illuminait tous les visages ;
    On se sentait unis ; on se rêvait vainqueurs.
    La bonne et joviale humeur
    Passait...