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    LE Sauveur était beau, dit la Sainte Ecriture ;
    L’homme qu’il incarnait cachait en vain le Dieu.
    C’est pourquoi les enfants au cœur plein de ciel bleu,
    S’approchaient, attirés par sa claire figure.

    Ainsi qu’au fond d’un bois se devine le feu
    Par un rayonnement pâle en la nuit obscure,
    Comme lui transparaît et se révèle un peu,
    Sous le manteau...

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    SOLITUDE du cœur, silence de la chambre,
    Calme du soir autour de la lampe qui luit,
    Pendant que sur les toits la neige de décembre
    Scintille au clair de lune épandu dans la nuit…

    Monotonie exquise, intimité de l’heure
    Que rythme également l’horloge au bruit léger, ―
    Voix si paisible et si douce que la demeure
    Familière, l’entend toujours sans...

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    SONNET, qui dis beaucoup en prenant peu d’espace,
    Goutte d’essence en un flacon de cristal pur ;
    Humble bijou d’argent ouvragé d’un art sûr,
    Qui restes, quand l’éclat hautain de l’ode passe ;

    Jeu fin de poésie où l’esprit se délasse ;
    Petit tableau de maître enfermant tout l’azur ;
    Chose pleine et légère ainsi qu’un épi mûr ;
    Etroit sonnet où...

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    A la candeur des lys, à la douceur des roses,
    Pour peindre avec les fleurs votre intime beauté,
    J’ai joint, vous connaissant un peu, l’humilité
    Des violettes, sous l’herbe secrète écloses.

    J’ai, pour symboliser votre rire argentin,
    Mis une grappe de muguets aux claires cloches,
    Puis, ayant disposé ces fleurs comme des strophes,
    J’ai lié le...

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    UNE peine est au fond de ton sourire fier ;
    Et de tes bleus regards les larmes retenues
    Tomberaient lentement sur tes belles mains nues,
    Si tu n’avais noyé ton âme en leur flot clair.

    Ton front est lourd d’angoisse, et tu souffris hier
    Pour la première fois des douleurs inconnues ;
    Avec l’amour trahi, les souffrances venues
    Ont passé sur ton...

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    SAVOURONS l’heure lente, et l’ombre, et le silence
    Que notre âme au repos se berce et se balance
    Comme un arbre tranquille au vent mélodieux
    Nous avons trop vécu de jours laborieux :
    Déposons le fardeau des tâches et des peines,
    Et regardons briller les étoiles sereines…
    Comme nous sommes fous d’oublier tant le ciel
    Nous que hante un désir de...

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    UN air, auquel le vent du soir donne des ailes,
    Un air de violon ou de violoncelle

    Passe rapidement, triste et profond, sur nous,
    Comme un oiseau perdu venant on ne sait d’où.

    Il ralentit parfois son vol, puis l’accélère,
    Descend, monte, s’élance, atteint la lune claire.

    Et redescend, plus faible à travers la rumeur,
    Plane, remonte encore,...

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    AUX feux de mon esprit qui s’allume dans l’ombre,
    Je me regarde vivre avec étonnement :
    Une fierté triomphe en ma stature sombre,
    Et je suis comme un roi promis au firmament !

    J’ai des chants de victoire au cœur, je me célèbre !
    Comme autrefois David devant l’arche a dansé,
    J’élève un hymne d’or à ma propre ténèbre,
    Et d’un éclair divin je me...

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    J’IMPROVISE ces vers mystérieux pour une
    Qui rayonne de grâce et de blanche beauté,
    Dont le regard semble un crépuscule d’été
    Qui se meurt lentement par un lever de lune.

    Je ne sais pas pourquoi je lui donne ces vers.
    Je vois dans ma pensée éclore son sourire,
    Et l’instant recueilli me contraint de l’écrire :
    Je l’écris, et son âme apparaît...

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    LES Visions du soir passent, comme des vierges
    En fins souliers d’azur, en robes de lin blanc,
    Et leurs doigts délicats sont étoilés de cierges
    Dont le feu pâle est sous l’haleine vacillant.

    Les Visions du soir, cortèges angéliques,
    Chantent, dans la douceur de l’heure qui s’éteint,
    Avec des voix de ciel, d’adorables cantiques
    Qui font battre...