•  
            L’orgueil des lourds anneaux, la pompe des parures,
            Mêlent l’éclat de l’art à ton charme pervers,
            Et les gardénias qui parent les hivers
            Se meurent dans tes mains aux caresses impures.

            Ta bouche délicate aux fines ciselures
            Excelle à moduler l’artifice des vers :
            Sous les flots de satin...

  •  
    Orgueil ! ô loi suprême et suprême devoir,
    Fait de majesté sainte et de beauté pensive,
    Seul culte dont la foi ne puisse décevoir,
    Seul rêve d’infini qui, dans le tombeau noir,
          Au vieux rêve divin survive !

    Sombre consolateur de notre cœur blessé,
    Qui viens à nous, les bras lourds de palmes augustes,
    Seul rédempteur que les dieux morts...

  • J’ai dit ailleurs l’orgueil de la possession
    Et le joyeux émoi d’occuper la Sion
    Pas céleste, mais presque, à force d’être bonne
    A garder après siège fait, de ta personne
    Physique, et le butin inépuisable. Mais,
    Tout en continuant de piller dru, je vais
    Exalter maintenant ta gloire intérieure,
    Tes vertus, en un mot, qui ne sont point un leurre
    (...

  • La matière & la forme étaient encor futures.
    Le Seigneur désira l’amour des créatures ;
    Il fit l’Éden, le lieu magnifique & charmant,
    Disant : « L’Homme y vivra dans le contentement
    De respirer mon souffle & de voir ma lumière. »
    Et, du pied, le Seigneur fit rouler une pierre,
    Et la pierre prit vie, & ce fut l’Homme.

    ...

  • Près de la Setch guerrière aux huttes sans clôture
    Un Zaporogue dort sur la route, en travers,
    Pareil aux demi-dieux dont en leurs anciens vers
    Les Cobzars ont chanté l’héroïque stature.

    L’or de son caftan turc et sa riche ceinture
    De boue et de goudron par mépris sont couverts ;
    Vingt fois de son sang libre il a teint les prés verts ;
    Il prend la vie...

  • Non, non, je ne suis pas de ces femmes qui meurent
    Et rendent ce dernier service à leurs bourreaux,
    Pour qu’ils vivent en paix & sans soucis demeurent.

    Vois-tu, ces dévoûments sont niais s’ils sont très-beaux.
    Les hommes, je le sais, se complaisent trop vite,
    Le pied sur ces cercueils, à poser en héros,

    Et j’ai dégoût d’ouïr la manière hypocrite
    ...

  •  
    Le regard des humains dans le gouffre s’abîme,
    L’immensité l’égare au sein du merveilleux ;
    Mais, planant en l’abstrait, essor mystérieux,
    Leur esprit peut atteindre à l’horizon sublime,
    Puis qu’au delà des temps révolus emporté,
    Il a deviné Dieu dans son Éternité.

  •  
    Refuge des grands cœurs, abri des nobles âmes,
    O bouclier trempé dans les pleurs et les flammes,
    Toi dont l’ange tombé dans les gouffres brûlants,
    Vaincu, mais indompté, couvrit ses larges flancs ;
    Cilice de l’archange, ô douloureuse armure,
    Orgueil ! voix qui jamais ne se plaint ni murmure ;
    Orgueil ! austère ami des vaincus glorieux,
    Toi dont...

  •  
        Je voile avec dédain le trésor qui me reste…
        Mon orgueil de poète est en moi comme un mal
        Tenace, suraigu, dominant, animal…
        Car l’orgueil du poète est terrible et funeste…

        Quand la foule amassait la farine et le mil,
        Mon orgueil m’enjoignit de m’astreindre et me taire,
        Inexorable autant que le lointain tonnerre...

  •  
        Le mensonge de ces gloires immédiates
        Vers qui monte l’encens de vaines aromates !

        O mensonge de ces paroles que l’on dit
        Et que pleure un poète, en un beau soir maudit !

        Je porte dans mon cœur et dans mon âme nue
        L’orgueil d’être farouche, et d’être méconnue !

        Et je garde, malgré les deuils, mon cœur hautain
        ...