• Tout vit,tout aime ! et moi, triste et seul, je me dresse
    Ainsi qu’un arbre mort sur le ciel du printemps.
    Je ne peux plus aimer, moi qui n’ai que trente ans,
    Et je viens de quitter sans regrets ma maîtresse.

    Je suis comme un malade aux pensers assoupis
    Et qui, plein de l’ennui de sa chambre banale,
    N’a pour distraction stupide et machinale,
    Que de...

  • Dans un vieux square où l’océan
    Du mauvais temps met son séant
    Sur un banc triste aux yeux de pluie
    C’est d'une blonde
    Rosse et gironde
    Que je m’ennuie
    Dans ce cabaret du Néant
    Qu’est notre vie.

    Dans un vieux square où l’océan
    Du mauvais temps met son séant
    Sur un banc triste aux yeux de pluie
    C’est d'...

  •  
    Oh ! combien de mes jours le cercle monotone
    Effare ma pensée et d’ennuis la couronne !
    Que faire de mon âme et de ses saints transports,
    Dans cet air étouffant qui pèse sur la ville,

    Au milieu d’une foule insouciante et vile,
    Où dort l’enthousiasme, où tous les cœurs sont morts !

    Que faire, dites-moi, de ce culte funeste
    Pour tout ce qui...

  • J'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans.

    Un gros meuble à tiroirs encombré de bilans,
    De vers, de billets doux, de procès, de romances,
    Avec de lourds cheveux roulés dans des quittances,
    Cache moins de secrets que mon triste cerveau.
    C'est une pyramide, un immense caveau,
    Qui contient plus de morts que la fosse commune.
    - Je suis un cimetière...

  • Pluviôse, irrité contre la ville entière,
    De son urne à grands flots verse un froid ténébreux
    Aux pâles habitants du voisin cimetière
    Et la mortalité sur les faubourgs brumeux.

    Mon chat sur le carreau cherchant une litière
    Agite sans repos son corps maigre et galeux ;
    L'âme d'un vieux poète erre dans la gouttière
    Avec la triste voix d'un fantôme frileux...

  • Je suis comme le roi d'un pays pluvieux,
    Riche, mais impuissant, jeune et pourtant très vieux,
    Qui, de ses précepteurs méprisant les courbettes,
    S'ennuie avec ses chiens comme avec d'autres bêtes.
    Rien ne peut l'égayer, ni gibier, ni faucon,
    Ni son peuple mourant en face du balcon.
    Du bouffon favori la grotesque ballade
    Ne distrait plus le front de ce cruel...

  • Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
    Sur l'esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
    Et que de l'horizon embrassant tout le cercle
    Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits ;

    Quand la terre est changée en un cachot humide,
    Où l'Espérance, comme une chauve-souris,
    S'en va battant les murs de son aile timide
    Et se cognant la...

  • " C'est moi ; - moi qui, du fond des siècles et des âges,
    Fis blanchir le sourcil et la barbe des sages ;
    La terre à peine ouverte au soleil souriant,
    C'est moi qui, sous le froc des vieux rois d'Orient,
    Avec la tête basse et la face pensive,
    Du haut de la terrasse et de la tour massive,
    Jetai cette clameur au monde épouvanté
    Vanité. vanité, tout n'est que...

  • Les roses étaient toutes rouges
    Et les lierres étaient tout noirs.

    Chère, pour peu que tu ne bouges,
    Renaissent tous mes désespoirs.

    Le ciel était trop bleu, trop tendre,
    La mer trop verte et l'air trop doux.

    Je crains toujours, - ce qu'est d'attendre !
    Quelque fuite atroce de vous.

    Du houx à la feuille vernie
    Et du luisant...

  • L'orageux crépuscule oppresse au loin la mer
    Et les noirs sapins. L'ombre, hélas ! revient toujours.
    Ah ! je hais les désirs, les espoirs, les amours,
    Autant que les damnés peuvent haïr l'enfer.

    Car je n'étais point né pour vivre : j'étais né
    Pour végéter, pareil à la mousse ou pareil
    Aux reptiles, et pour me gorger de soleil
    Sur un roc d'un midi sans...