Sur ce grabat, chaud de mon agonie,
Pour la pitié je trouve encor des pleurs ;
Car un parfum de gloire et de génie
Est répandu dans ce lieu de douleurs ;
C’est là qu’il vint, veuf de ses espérances,
Chanter encor, puis prier et mourir :
Et je répète en comptant mes souffrances :
Pauvre Gilbert...
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Avril emplissait l’air de souffles caressants,
Aux rameaux noirs tremblaient les bourgeons rougissants,
Dans les hauts marronniers quelques feuilles frileuses
Sortaient timidement de leurs gaines soyeuses.
Comme une jeune mère aux charmantes pudeurs,
La terre se voilait de fécondes verdeurs.
Les germes s’éveillaient sous la brise plus chaude,
... -
En vain le jour succède au jour,
Ils glissent sans laisser de trace ;
Dans mon âme rien ne t'efface,
Ô dernier songe de l'amour !
Je vois mes rapides années
S'accumuler derrière moi,
Comme le chêne autour de soi
Voit tomber ses feuilles fanées.
Mon front est blanchi par le temps ;
Mon sang refroidi coule à peine,
Semblable à cette... -
Nous étions, ce soir-là, sous un chêne superbe
(Un chêne qui n'était peut-être qu'un tilleul)
Et j'avais, pour me mettre à vos genoux dans l'herbe,
Laissé mon rocking-chair se balancer tout seul.
Blonde comme on ne l'est que dans les magazines
Vous imprimiez au vôtre un rythme de canot ;
Un bouvreuil sifflotait dans les branches voisines
(Un bouvreuil... -
J'aime le souvenir de ces époques nues,
Dont Phoebus se plaisait à dorer les statues.
Alors l'homme et la femme en leur agilité
Jouissaient sans mensonge et sans anxiété,
Et, le ciel amoureux leur caressant l'échine,
Exerçaient la santé de leur noble machine.
Cybèle alors, fertile en produits généreux,
Ne trouvait point ses fils un poids trop onéreux,... -
Ô délire d'une heure auprès de lui passée,
Reste dans ma pensée !
Par toi tout le bonheur que m'offre l'avenir
Est dans mon souvenir.
Je ne m'expose plus à le voir, à l'entendre,
Je n'ose plus l'attendre,
Et si je puis encor supporter l'avenir,
C'est par le souvenir.
Le temps ne viendra pas pour guérir ma souffrance,
Je n'ai plus d'... -
Déjà la nuit s'avance, et, du sombre orient,
Ses voiles par degrés dans les airs se déploient.
Sommeil, doux abandon, image du néant,
Des maux de l'existence heureux délassement,
Tranquille oubli des soins où les hommes se noient ;
Et vous, qui nous rendez à nos plaisirs passés,
Touchante Illusion, déesse des mensonges,
Venez dans mon asile, et sur mes... -
A la princesse D.....
C'est un parc scandinave, aux sapins toujours verts,
Où le vent automnal courbe les fleurs d'hivers
Dans les vases de marbre ancien sur la terrasse ;
Et la vierge royale en qui revit la race
Des brumeux Suénon dont son père descend,
L'enfant blanche aux yeux clairs, la princesse du sang,
Immobile devant la balustrade antique,
... -
Nane, as-tu gardé souvenir
Du Panthéon-Place Courcelle
Qui roulait à cris de crécelle,
Sans au but jamais parvenir ;
Du jour où te sculptait la brise
Sous ta jupe noire et cerise ;
De l'impériale au banc haut,
Où se scandait comme un ïambe
La glissade avec le cahot,
- Et du vieux qui lorgnait tes jambes ? -
En souvenir des grandes Indes,
Harmonieux décor,
La Rafette nourrit d'accord
Un paon et quatre dindes.
Et l'on croirait - tous ces échos
Gloussants, l'autre qui grince -
D'un préfet d'or, dans sa province,
Borné de radicaux.