• J’ai vu ton sourire et tes larmes,
    J’ai vu ton cœur triste et joyeux :
    Qui des deux a le plus de charmes ?
    Dis-moi ce que j’aime le mieux :
    Les perles de ta bouche ou celles de tes yeux ?

  •  
    Des fluides moments nul ne voit le passage,
    Et le printemps des jours s’éteint comme il est né ;
    C’est insensiblement, sur le fleuve de l’âge,
    Qu’à la froide vieillesse un homme est entraîné.

    Mais je me saurai vieux quand cette chère...

  • Chers auditeurs, mon visage
    Pour moi seul vaut un portrait ;
    Mon miroir en garderait
    Le secret, si j’étais sage.

    Parmi mes petits neveux
    Qui lui sourira ? Qu’importe,
    Quand la folle tête est morte,
    La couleur de ses cheveux ?

    Ô poètes éphémères,
    Laissons la postérité ;
    N’est-ce pas, en vérité,
    La reine de nos chimères ?

    ...
  •  

    Je ne sais pas ton nom, comtesse ou bien marquise,
    Dont le portrait charmant rit dans ce cadre d’or ;
    Mais nulle, en sa beauté, n’eut plus de grâce exquise,
    Au temps qu’on était jeune et qu’on aimait encor.

    Tes cheveux à frimas, où le zéphyr se joue,
    Effleurent mollement ton visage vermeil,
    Car le pastel du maître a semé sur ta joue
    L’...

  •  

    QUE de rêves, de vœux attendris me rappelle
    Soudainement ce portrait !
    Est-elle, dans son charme élégant, aussi belle ?
    Est-il encore aussi vrai ?

    Mon ardeur était jeune et mon amour sincère.
    La brume des jours lointains
    Pour l’évoquer, hélas ! m’a rendu nécessaire
    Cette image aux tons éteints.

    Plus vivant, plus précis, plus clair que...

  •  
    Elle téta la vie au sein d’une pauvresse.
    Dès le maillot, elle eut l’abominable ivresse
    D’un lait sanguinolent et presque vénéneux.
    L’air froid d’un gîte infect aux murs fuligineux
    Granula ses poumons en gelant sa poitrine ;
    À travers sa peau, mince et navrante vitrine,
    Sa mère put compter ses pauvres petits os.
    Elle a grandi pourtant :...

  • C’est toi, dénaturée ! Oui, te voilà, c’est toi
    Qui fis taire ton cœur pour écouter ta foi,
    Qui, pour gagner ton ciel de larve et de chouette,
    Foulas ton âme aux pieds, mère sourde-muette,
    Et qui, lorsque ton fils se couchait en travers
    De ta porte, pleurant et les deux bras ouverts,
    Marchas sur ton enfant pour entrer dans le cloître.

    Quand l’amour...

  • Celui dont nous t’offrons l’image,
    Et dont l’art, subtil entre tous,
    Nous enseigne à rire de nous,
    Celui-là, lecteur, est un sage.

    C’est un satirique, un moqueur ;
    Mais l’énergie avec laquelle
    Il peint le Mal et sa séquelle
    Prouve la beauté de son cœur.

    Son rire n’est pas la grimace
    De Melmoth ou de Méphisto
    Sous la torche de l’...

  • Vous me demandez mon portrait,
    Mais peint d'après nature :
    Mon cher, il sera bientôt fait
    Quoiqu'en miniature.

    Je suis un jeune polisson
    Encore dans les classes ;
    Point sot, je le dis sans façon
    Et sans fades grimaces.

    Oui, il ne fut babillard,
    Ni docteur en Sorbonne,
    Plus ennuyeux et plus braillard
    Que moi-même en personne....

  • La Maladie et la Mort font des cendres
    De tout le feu qui pour nous flamboya.
    De ces grands yeux si fervents et si tendres,
    De cette bouche où mon coeur se noya,

    De ces baisers puissants comme un dictame,
    De ces transports plus vifs que des rayons,
    Que reste-t-il ? C'est affreux, ô mon âme !
    Rien qu'un dessin fort pâle, aux trois crayons,
    ...