• Un cavalier disait à Milton : « Je vous plains !
    Car vos yeux, de colère et d’espérance pleins,
    Qui déchiraient la voûte où le soleil gravite,
    S’égarent, fous d’horreur, dans la nuit sans limite.
    Comme un aigle banni du mont aérien
    Dans un sombre cachot, vous ne voyez plus rien
    Sur cette terre aux feux du ciel irradiée ;
    Ni le couchant avec sa pourpre...

  •  
    « Dieu dont l’arc est d’argent, dieu de Claros, écoute ;
    O Sminthée-Apollon, je périrai sans doute,
    Si tu ne sers de guide à cet aveugle errant. »
    C’est ainsi qu’achevait l’aveugle en soupirant,
    Et près des bois marchait, faible, et sur une pierre
    S’asseyait. Trois pasteurs, enfants de cette terre,
    Le suivaient, accourus aux abois turbulents
    ...

  • Un aveugle au coin d’une borne,
    Hagard comme au jour un hibou,
    Sur son flageolet, d’un air morne,
    Tâtonne en se trompant de trou,

    Et joue un ancien vaudeville
    Qu’il fausse imperturbablement ;
    Son chien le conduit par la ville,
    Spectre diurne à l’œil dormant.

    Les jours sur lui passent sans luire ;
    Sombre, il entend le monde obscur
    ...

  • L’humble vieille qui se désole
    Dit, gémissant chaque parole :
    « Contr’ le sort j’n’ai plus d’résistance.
    ...

  • L'oeil tué n'est pas mort
    Un coin le fend encor
    Encloué je suis sans cercueil
    On m'a planté le clou dans l'oeil
    L'oeil cloué n'est pas mort
    Et le coin entre encor

    Deus misericors
    Deus misericors
    Le marteau bat ma tête en bois
    Le marteau qui ferra la croix
    Deus misericors
    Deus misericors

    Les oiseaux croque-morts
    Ont...

  • Enfant aveugle, nain, qui n'as autre prouësse,
    Sinon en trahison quelque flesche tirer,
    Qui n'as autre plaisir sinon de deschirer
    En cent pieces les coeurs de la folle jeunesse ;

    Le corps sans honte nud si ton pere te laisse,
    Il monstre qu'on se doit loing de toy retirer,
    Qui n'as rien que les coeurs que tu peux attirer
    Par les traistres appas de...

  • Aidons-nous mutuellement,
    La charge des malheurs en sera plus légère ;
    Le bien que l'on fait à son frère
    Pour le mal que l'on souffre est un soulagement.
    Confucius l'a dit ; suivons tous sa doctrine.
    Pour la persuader aux peuples de la Chine,
    Il leur contait le trait suivant.

    Dans une ville de l'Asie
    Il existait deux malheureux,
    L'un perclus,...

  • Pauvre exilé de l'air ! Sans ailes, sans lumière,
    Oh ! Comme on t'a fait malheureux !
    Quelle ombre impénétrable inonde ta paupière !
    Quel deuil est étendu sur tes chants douloureux !
    Innocent Bélisaire ! Une empreinte brûlante
    Du jour sur ta prunelle a séché les couleurs,
    Et ta mémoire y roule incessamment des pleurs,
    Et tu ne sais pourquoi Dieu fit la nuit...

  • Amour, tu es aveugle et d'esprit et de vue,
    De ne voir pas comment ta force diminue,
    Ton empire se perd, tu révoltes les tiens,
    Faute de ne chasser une infernale peste
    Qui fait que tout le monde à bon droit te déteste,
    Pour ne pouvoir jouir sûrement de tes biens.

    C'est de ton doux repos la mortelle ennemie,
    C'est une mort cruelle au milieu de la...

  • Merci, poète! -- au seuil de mes lares pieux,
    Comme un hôte divin, tu viens et te dévoiles ;
    Et l'auréole d'or de tes vers radieux
    Brille autour de mon nom comme un cercle d'étoiles.

    Chante ! Milton chantait ; chante ! Homère a chanté.
    Le poète des sens perce la triste brume ;
    L'aveugle voit dans l'ombre un monde de clarté.
    Quand l'oeil du corps...