André Chénier

  • A compter nos brebis je remplace ma mère ;
    Dans nos riches enclos j'accompagne mon père ;
    J'y travaille avec lui. C'est moi de qui la main,
    Au retour de l'été, fait résonner l'airain
    Pour arrêter bientôt d'une ruche troublée
    Avec ses jeunes rois la jeunesse envolée...

  • France ! ô belle contrée, ô terre généreuse
    Que les dieux complaisants formaient pour être heureuse,
    Tu ne sens point du Nord les glaçantes horreurs ;
    Le Midi de ses feux t'épargne les fureurs ;
    Tes arbres innocents n'ont point d'ombres mortelles ;
    Ni des poisons épars...

  • Abel, doux confident de mes jeunes mystères,
    Vois, mai nous a rendu nos courses solitaires.
    Viens à l'ombre écouter mes nouvelles amours ;
    Viens. Tout aime au printemps, et moi j'aime toujours.
    Tant que du sombre hiver dura le froid empire,
    Tu sais si l'aquilon s'...

  • .................... Terre, terre chérie
    Que la liberté sainte appelle sa patrie ;
    Père du grand sénat, ô sénat de Romans,
    Qui de la liberté jetas les fondements ;
    Romans, berceau des lois, vous, Grenoble et Valence,
    Vienne, toutes enfin, monts sacrés d'où la France...

  • Tu gémis sur l'Ida, mourante, échevelée,
    Ô reine ! ô de Minos épouse désolée !
    Heureuse si jamais, dans ses riches travaux,
    Cérès n'eût pour le joug élevé des troupeaux !
    Tu voles épier sous quelle yeuse obscure,
    Tranquille, il ruminait son antique pâture ;
    Quel...

  • Voilà ce que chantait aux Naïades prochaines
    Ma Muse jeune et fraîche, amante des fontaines,
    Assise au fond d'un antre aux nymphes consacré,
    D'acanthe et d'aubépine et de lierre entouré.
    L'Amour, qui l'écoutait caché dans le feuillage,
    Sortit, la salua Sirène du...

  • " Mon visage est flétri des regards du soleil.
    Mon pied blanc sous la ronce est devenu vermeil.
    J'ai suivi tout le jour le fond de la vallée ;
    Des bêlements lointains partout m'ont appelée.
    J'ai couru ; tu fuyais sans doute loin de moi :
    C'était d'autres pasteurs. Où...

  • Là reposait l'Amour, et sur sa joue en fleur
    D'une pomme brillante éclatait la couleur.
    Je vis, dès que j'entrai sous cet épais bocage,
    Son arc et son carquois suspendus an feuillage.
    Sur des monceaux de rose au calice embaumé
    Il dormait. Un souris sur sa bouche...

  • Mais telle qu'à sa mort pour la dernière fois,
    Un beau cygne soupire, et de sa douce voix,
    De sa voix qui bientôt lui doit être ravie,
    Chante, avant de partir, ses adieux à la vie,
    Ainsi, les yeux remplis de langueur et de mort,
    Pâle, elle ouvrit sa bouche en un dernier...

  • Toujours ce souvenir m'attendrit et me touche,
    Quand lui-même, appliquant la flûte sur ma bouche,
    Riant et m'asseyant sur lui, près de son coeur,
    M'appelait son rival et déjà son vainqueur.
    Il façonnait ma lèvre inhabile et peu sûre
    A souffler une haleine harmonieuse...