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    I

    Ô Ciel inférieur, Terre des siècles ! l’homme
    Avec autant d’effroi que de désir te nomme ;
    Heureux s’il a vécu sans honte et sans remord.
    Il passe ; rien n’est vrai, de sa vie éphémère.
    À peine il vient d’entrer dans le sein de sa mère
    Que déjà son visage est tourné vers la mort.

    Enveloppé de lin, pris dans mes bandelettes,
    Baigné d’...

  • L’heureuse cendre aultresfois composee
    En un corps chaste, ou Vertu reposa,
    Est en ce lieu par les Graces posee
    Parmy ses os, que Beaulté composa.

    O Terre indigne : en toy son repos a
    Le riche Estuy de celle Ame gentile,
    En tout sçauoir sur tout aultre subtile,
    Tant que les Cieulx, par leur trop grand enuie,
    Avant ses iours l’ont d'entre nous...

  • Dans le golfe aux jardins ombreux,
    Des couples blonds d’amants heureux
    Ont fleuri les mâts langoureux
                De ta galère,
    Et, caressé du doux été,
    Notre beau navire enchanté
    Vers les pays de volupté
                Fend l’...

  • J’évoque, sous un ciel ignoré des regards,
    Au pays pacifique où des clartés sereines
    Attardent plus longtemps leur doux sourire épars,
    Un bois tout murmurant de sources léthéennes....

    Un soupir est dans l’air !... Tout le ciel en frémit !...
    Au gré de la lueur plus vive ou plus tremblante,
    Le bruit mélodieux s’élève ou s’assoupit,
    Si vague, qu’on...

  • Voici que je défaille et tremble de vous voir,
    Bel été qui venez jouer et vous asseoir
    Dans le jardin feuillu, sous l'arbre et la tonnelle.
    Comme votre douceur sur mon âme ruisselle !
    Je retrouve le pré, l'étang, les noyers ronds,
    Les rosiers vifs avec leurs vols de moucherons,
    Le sapin dont l'écorce est résineuse et chaude ;
    Tout le miel de l'été...

  • Heureuse est la peine
    De qui le plaisir
    À sur foi certaine
    Assis son désir.
    L'on peut assez en servant requérir,
    Sans toutefois par souffrir acquérir
    Ce que l'on pourchasse
    Par trop désirer,
    Dont en male grâce
    Se faut retirer.

    Car un tel service
    Ne prétend qu'au point,
    Qui par commun vice
    L'honneur pique, et point....

  • Heureuse fut, Seigneur, cettre troupe choisie
    Qui vous vid à ce coup remonter dans les Cieux,
    Mais d'un bien plus grand heur est toute ame saisie
    Qui des yeux de la foy vous voit ore ez hauts lieux.

    Il vous a pleu, mon Christ, tirer de mes ans vieux
    Aux loisirs derobez cette humble poësie,
    Faites qu'à tout esprit elle donne ces yeux,
    Afin que tout...

  • Au moins toi, claire et heureuse fontaine,
    Et vous, ô eaux fraîches et argentines,
    Quand celle en vous - de tout vice lointaine -
    Se vient laver ses deux mains ivoirines,
    Ses deux soleils, ses lèvres corallines,
    De Dieu créées pour ce monde honorer,
    Devriez garder pour plus vous décorer
    L'image d'elle en vos liqueurs profondes.
    Car plus souvent je...

  • Heureuse solitude,
    Seule béatitude,
    Que votre charme est doux !
    De tous les biens du monde,
    Dans ma grotte profonde,
    Je ne veux plus que vous !

    Qu'un vaste empire tombe,
    Qu'est-ce au loin pour ma tombe
    Qu'un vain bruit qui se perd ;
    Et les rois qui s'assemblent,
    Et leurs sceptres qui tremblent,
    Que les joncs du désert ?...

  • L'oiseau miraculeux de l'heureuse Arabie
    Qui vit sans parangon sous le manteau des cieux,
    Quand il a sillonné le grand fleuve oublieux,
    Il respire en son corps une seconde vie.

    Sur le front d'un rocher d'un bois d'Éthiopie,
    Il desseigne son nid, puis élevant ses yeux
    Vers la pente du ciel, le soleil radieux
    S'élance en un moment sur sa plume...