Théodore de Banville

  • Les Dieux, pour lui laisser le vin, buvaient du fiel.
    L'aigle à ses pieds veillait, ayant quitté son aire ;
    Le lion devant lui se couchait, débonnaire,
    L'abeille était joyeuse et lui donnait son miel.

    Il avait sur son front le signe essentiel,
    Et du rouge vêtu,...

  • Ce fut un beau souper, ruisselant de surprises.
    Les rôtis, cuits à point, n'arrivèrent pas froids ;
    Par ce beau soir d'hiver, on avait des cerises
    Et du johannisberg, ainsi que chez les rois.

    Tous ces amis joyeux, ivres, fiers de leurs vices,
    Se renvoyaient les...

  • Miss Ellen, versez-moi le Thé
    Dans la belle tasse chinoise,
    Où des poissons d'or cherchent noise
    Au monstre rose épouvanté.

    J'aime la folle cruauté
    Des chimères qu'on apprivoise :
    Miss Ellen, versez-moi le Thé
    Dans...

  • Il semble qu'aux sultans Dieu même
    Pour femmes donne ses houris.
    Mais, pour moi, la vierge qui m'aime,
    La vierge dont je suis épris,

    Les sultanes troublent le monde
    Pour accomplir un de leurs voeux.
    La vierge qui m'aime est plus blonde
    Que les sables sous...

  • Puisque la Némésis, cette vieille portière,
    Court en poste et regarde à travers la portière
    Des arbres fabuleux faits comme ceux de Cham,
    Laissons Chandernagor, Pékin, Bagdad ou Siam
    Posséder ses appas, vieux comme sainte Thècle,
    Et désabonnons-nous le plus possible au...

  • Bien souvent je revois sous mes paupières closes,
    La nuit, mon vieux Moulins bâti de briques roses,
    Les cours tout embaumés par la fleur du tilleul,
    Ce vieux pont de granit bâti par mon aïeul,
    Nos fontaines, les champs, les bois, les chères tombes,
    Le ciel de mon enfance...

  • Avec ses caprices, la Lune
    Est comme une frivole amante ;
    Elle sourit et se lamente,
    Et vous fuit et vous importune.

    La nuit, suivez-la sur la dune,
    Elle vous raille et vous tourmente ;
    Avec ses caprices, la Lune
    Est comme une frivole amante.

    ...

  • Mourir de la poitrine
    Quand j'ai ces bras de lys,
    La lèvre purpurine,
    Les cheveux de maïs
    Et cette gorge rose,
    Ah ! la vilaine chose !
    Quel poëte morose
    Est donc ce Dumas fils !

    Je fus, pauvre colombe,
    Triste, blessée au flanc ;
    Déjà le...

  • Au bois de Boulogne, l'Hiver,
    La terre a son manteau de neige.
    Mille Iris, qui tendent leur piège,
    Y passent comme un vif éclair.

    Toutes, sous le ciel gris et clair,
    Nous chantent le même solfège ;
    Au bois de Boulogne, l'Hiver,
    La terre a son manteau de...

  • Près du ruisseau, sous la feuillée,
    Menons la Muse émerveillée
    Chanter avec le doux roseau,
    Puisque la Muse est un oiseau.

    Puisque la Muse est un oiseau,
    Gardons que quelque damoiseau
    N'apprenne ses chansons nouvelles
    Pour aller les redire aux belles....