Étienne de La Boétie

  • C'est Amour, c'est Amour, c'est luy seul, je le sens :
    Mais le plus vif amour, la poison la plus forte
    A qui onq pauvre coeur ait ouverte la porte.
    Ce cruel n'a pas mis un de ses traictz perçans,

    Mais arcq, traits et carquois, et luy tout, dans mes sens.
    Encor...

  • Je ne croiray jamais que de Venus sortisse
    Un tel germe que toy. Or ta race j'ay sceu,
    Ô enfant sans pitié : Megere t'a conceu,
    Et quelque louve apres t'a baillé pour nourrisse.

    Petit monstre maling, c'est ta vieille malice,
    Qui te tient acroupi ; aucun ne t'a...

  • Helas ! combien de jours, helas ! combien de nuicts
    J'ay vescu loing du lieu, où mon cueur fait demeure !
    C'est le vingtiesme jour que sans jour je demeure,
    Mais en vingt jours j'ay eu tout un siecle d'ennuis.

    Je n'en veux mal qu'à moy, malheureux que je suis,
    Si...

  • Tu m'as rendu la veuë, Amour, je le confesse.
    De grace que c'estoit à peine je sçavoy,
    Et or toute la grace en un monceau je voy,
    De toutes parts luisant en ma grande maistresse.

    Or de voir et revoir ce thresor je ne cesse,
    Comme un masson qui a quelque riche paroy...

  • Ô coeur léger, ô courage mal seur,
    Penses tu plus que souffrir je te puisse ?
    Ô bonté creuze, ô couverte malice,
    Traitre beauté, venimeuse doulceur !

    Tu estois donc tousjours seur de ta soeur ?
    Et moy, trop simple, il falloit que j'en fisse
    L'essay sur...

  • L'un chante les amours de la trop belle Hélène,
    L'un veut le nom d'Hector par le monde semer,
    Et l'autre par les flots de la nouvelle mer
    Conduit Jason gaigner les trésors de la laine.

    Moy je chante le mal qui à mon gré me meine :
    Car je veus, si je puis, par...

  • C'estoit alors, quand, les chaleurs passees,
    Le sale Automne aux cuves va foulant
    Le raisin gras dessoubz le pied coulant,
    Que mes douleurs furent encommencees.

    Le paisan bat ses gerbes amassees,
    Et aux caveaux ses bouillans muis roulant,
    Et des...

  • Ô qui a jamais veu une barquette telle,
    Que celle où ma maistresse est conduitte sur l'eau ?
    L'eau tremble, et s'esforçant sous se riche vaisseau,
    Semble s'enorgueillir d'une charge si belle.

    On diroit que la nuict à grands troupes appelle
    Les estoiles, pour...

  • Reproche moy maintenant, je le veux,
    Si oncq de toy j'ay eu faveur aucune,
    Traistre, legere, inconstance fortune.
    Reproche moi hardiment, si tu peux.

    Depuis le jour qu'en mal'heure mes yeux
    Voyent du ciel la lumiere importune,
    Je suis le but, la descharge...

  • C'est faict, mon coeur, quitons la liberté.
    Dequoy meshuy serviroit la deffence,
    Que d'agrandir et la peine et l'offence ?
    Plus ne suis fort, ainsi que j'ay esté.

    La raison fust un temps de mon costé,
    Or, revoltée, elle veut que je pense
    Qu'il faut servir...