Étienne de La Boétie

  • Ce jourd'huy du Soleil la chaleur alteree
    A jauny le long poil de la belle Ceres :
    Ores il se retire ; et nous gaignons le frais,
    Ma Marguerite et moy, de la douce seree,

    Nous traçons dans les bois quelque voye esgaree :
    Amour marche devant, et nous marchons...

  • Quand viendra ce jour là, que ton nom au vray passe
    Par France dans mes vers ? combien et quantes fois
    S'en empresse mon coeur, s'en demangent mes doits ?
    Souvent dans mes escris de soy mesme il prend place.

    Maulgré moy je t'escris, maulgré moy je t'efface.
    ...

  • Je tremblois devant elle, et attendois, transi,
    Pour venger mon forfaict quelque juste sentence,
    A moi mesme consent du poids de mon offence,
    Lors qu'elle me dict : " Va, je te prens à merci.

    Que mon loz desormais par tout soit esclarci :
    Emploie là tes ans, et...

  • Je voy bien, ma Dourdouigne, encor humble tu vas :
    De te monstrer Gasconne, en France, tu as honte.
    Si du ruisseau de Sorgue on fait ores grand conte,
    Si a il bien esté quelquefois aussi bas.

    Voys tu le petit Loir comme il haste le pas ?
    Comme desjà parmy les...

  • Pardon, Amour, Pardon : ô seigneur, je te voüe
    Le reste de mes ans, ma voix et mes escris,
    Mes sanglots, mes souspirs, mes larmes et mes cris :
    Rien, rien tenir d'aucun que de toy, je n'advoüe.

    Helas ! comment de moy ma fortune se joue !
    De toy, n'a pas long...

  • Maint homme qui m'entend, lors qu'ainsi je la vante,
    N'ayant oncq rien pareil en nulle autre esprouvé,
    Pense, ce que j'en dis, que je l'aye trouvé,
    Et croit qu'à mon plaisir ces louanges j'invente.

    Mais si rien de son los en sa faveur l'augmente,
    Si de mentir...

  • Quand j'ose voir Madame, Amour guerre me livre,
    Et se pique à bon droit que je vay follement
    Le cercher en son regne ; et alors justement
    Je souffre d'un mutin temeraire la peine.

    Or me tiens-je loing d'elle, et ta main inhumaine,
    Amour, ne chomme pas : mais si...

  • Un Lundy fut le jour de la grande journee
    Que l'Amour me livra : ce jour il fut vainqueur
    Ce jour il se fit maistre et tyran de mon coeur :
    Du fil de ce jour pend toute ma destinee.

    Lors fut à mon tourment ma vie abandonnee,
    Lors Amour m'asservit à sa folle...

  • J'estois prest d'encourir pour jamais quelque blasme,
    De colere eschaufé, mon courage brusloit,
    Ma fole voix au gré de ma fureur branloit,
    Je despitois les Dieux, et encores Madame,

    Lors qu'elle, de loing, jecte un brefuet dans ma flamme :
    Je le sentis soudain...

  • Si ma raison en moy s'est peu remettre,
    Si recouvrer asthure je me puis,
    Si j'ay du sens, si plus homme je suis,
    Je t'en mercie, ô bien heureuse lettre.

    Qui m'eust (hélas), qui m'eust sceu recognoistre,
    Lors qu'enragé, vaincu de mes ennuys,
    En blasphemant...