• Au Val-Bénit partez, fils de ma muse !
    A peine éclos, c'est là qu'il faut aller;
    Parlez sans moi , vous direz pour excuse .
    Il n'a pas, lui, d'ailes pour s'envoler. »

    Lisant Rousseau qu'aiment tous les poètes ,
    Là, j'ai coulé peu de jours bien remplis;
    Mais sans remords j'ai quitté mes Charmettes;
    L'air en est pur, ma pervenche est un lis.

    Oh...

  •  
    I

    Avant de terminer, mère, un dernier volume,
    Je suis venu, d’un pas ému, te l’apporter.
    Mère, au bord de ta fosse, où l’oiseau vient chanter,
    Sens-tu mon pied fouler le sol que mai parfume ?…

    Mère, dans ton cercueil, reconnais-tu ma voix ?…
    Avant d’ouvrir mon livre au grand souffle des cimes,
    Je suis venu t’offrir l’hommage de ces rimes,...

  • Mes chers petits enfants, pendant que vous dormez,
    Je vous offre à tous deux ces feuillets imprimés,
    Où mon âme se cache à l’ombre de la rime :
    À toi, mon premier né, grave et gentil Maxime,
    Déjà vieux de six ans, et savant comme à sept,
    Qui lis la Barbe-Bleue, et le Petit-Poucet,
    Mais qui ne comprends pas toujours bien ta lecture ;
    À toi, qui n’es pas...

  • Prison de Versailles, 8 septembre 1871

    Passez, passez, heures, journées !
    Que l’herbe pousse sur les morts !
    Tombez, choses à peine nées ;
    Vaisseaux, éloignez-vous des ports ;
    Passez, passez, ô nuits profondes.
    Emiettez-vous, ô vieux monts ;
    Des cachots, des tombes, des ondes.
    Proscrits ou morts nous reviendrons.

    Nous...

  •  
    Hélas ! Comme c’est peu compris, les grandes âmes !
    L’orage était bien noir quand nous nous rencontrâmes ;
    Je livrais au vieux monde un assaut hasardeux ;
    Je luttais ; vous, tribuns de l’art, maîtres tous deux,
    Forts, dressant devant moi votre épée étoilée,
    Vous me prîtes la main dans l’ardente mêlée ;
    Et dans ce siècle, où l’âme est en proie aux...

  •  

    Souvent, lorsque la nuit de mai pâle et pensive
    Envahit les grands flots du Fleuve qui s’endort,
    Écartant de la main la branche ou l’ajonc d’or,
    Je vais, distrait, fouler le sable de la rive.

    Tour à tour l’œil au ciel et sur l’eau fugitive
    Qui reflète en son calme azur les pins du Nord,
    J’aime à voir vers le sud cingler la nef massive
    Dont l’...

  •  
    Le Destin a voulu que vous fussiez charmante,
    Et vous l’êtes. Riez, miss Mary, regardez :
    Vous charmez toute chose et tout vous complimente ;
    Les cœurs courent à vous, par vos beaux yeux guidés.
     
    Et vos cheveux sont d’or, l’air de mai les tourmente,
    Votre frais rire éclate en grelots saccadés ;
    On vous aime de tout, même d’être inclémente,...

  • Lorsque Louis Quatorze, apprêtant pour l’histoire
    Les magiques splendeurs dont l’éclat nous surprend,
    Parmi les demi-dieux qui couronnaient sa gloire,
    Demandait, ébloui : « Quel est donc le plus grand ?

    — Sire, lui dit Boileau, le plus grand c’est Molière ! »
    Il ne souriait point, et le roi s’étonna.
    La Comédie ainsi marcherait la première ?
    Tartuffe...

  • Fuis, âme blanche, un corps malade et nu ;
    Fuis en chantant vers un monde inconnu !

    À dix-huit ans, je n’enviais pas, certes !
    Le froid bandeau qui presse les yeux morts.
    Dans les grands bois, dans les campagnes vertes,
    Je me plongeais avec délice alors ;
    Alors les vents, le soleil et la pluie,
    Faisaient rêver mes yeux toujours ouverts ;
    Pleurs...

  • Par une nuit d’été, quand le ciel est d’azur,
    Souvent un feu follet sort du marais impur.
    Le passant qui le voit le prend pour la lumière
    Qui scintille aux carreaux lointains d’une chaumière ;
    Vers le fanal perfide il s’avance à grands pas,
    Tout joyeux ; et bientôt, ne s’apercevant pas
    Qu’un abîme est ouvert à ses pieds, il y tombe,
    Et son corps reste...