• Toute chose, ici-bas, cherchant Dieu comme un pôle,
    Se tourne, en frémissant, vers son dôme éternel :
    Élancé dans les airs, le mont, sur son épaule,
    Comme un pavillon bleu porte le vaste ciel.

    Le cèdre du Liban, loin de la roche nue,
    Pousse toute sa sève à flots tumultueux,
    Géant désespéré qui, pour toucher la nue,
    Hausse son front superbe et tord...

  • IX

    Le lion du midi voit venir l'ours polaire.
    L'ours court droit au lion, grince, et plein de colère,
    L'attaque plus grondant que l'autan nubien.
    Et le lion lui dit : Imbécile ! c'est bien.
    Nous sommes dans le cirque, et tu me fais la guerre.
    Pourquoi ? Vois-tu là-bas cet homme au front vulgaire ?
    C'est un nommé Néron,...

  •  
    Lasse comme les flot, lasse comme les voiles,
    J’entre dans le doux port plein d’embruns et d’étoiles.

    Depuis des temps j’ai vu les plus divins climats
    Et je dors en ce havre où sommeillent des mâts.

    Mon esprit s’est tourné vers des rêves plus sages,
    Je désapprends enfin l’ardeur des longs voyages.

    Tant de rires dorés viennent vous décevoir
    ...

  • La jeune dame qui marche sur la pelouse
    Devant l’été paré de pommes et d’appas,
    Quand des heures Midi comblé jette les douze,
    Dans cette plénitude arrêtant ses beaux pas,

    A dit un jour, tragique abandonnée — épouse —
    À la mort séduisant son Poète : Trépas !
    Tu mens. Ô vain climat nul ! je me sais jalouse
    Du faux Éden que, triste, il n’habitera pas....

  •  
    Je sais combien vaine est l’image
    Que l’illusion du décor
    Prête au fantastique nuage,
    Dans le lointain des couchants d’’or ;

    Je sais pourquoi la lune est pâle
    Et pleure des bonheurs enfuis,
    Ainsi qu’une larme d’opale,
    Dans le lointain des tristes nuits ;

    De l’abîme écartant les voiles,
    Je puis lire, en lettres de feu,
    Qu’il...

  •  
    Dans le peu de défauts dont je suis incapable,
    Compte celui d’une jalousie implacable
    Envers toi, mon Mensonge aimé qui m’a dompté,
    Jusqu’à m’être un tel parangon de vérité
    Que quand tu sors, belle, habillée, et pour des heures,
    Prétexte, fourberie, astuces, feintes, leurres,
    Tu me dis : « Je fais une course », et je te crois.
    La foi du...

  • Le garcon délabré qui n'a rien à faire
    Que de se gratter les doigts et se pencher sur mon épaule :
      « Dans mon pays il fera temps pluvieux,
      Du vent, du grand soleil, et de la pluie ;
      C'est ce qu'on appelle le jour de lessive des gueux. »
    (Bavard, baveux, à la croupe arrondie,
    Je te prie, au moins, ne bave pas dans la soupe).
      « Les saules...

  • Dans le Verger où sont les arbres de lumière,
    La pulpe des fruits lourds pleure ses larmes d’or,
    Et l’immense Bagdad s’alanguit et s'endort
    Sous le ciel étouffant qui bleuit la rivière.

    Il est deux heures. Les palais silencieux
    Ont des repas au fond des grandes salles froides
    Et Sindbad le marin, sous les tentures roides,
    Passe l’alcarazas d’un air...

  •  
    Dans le vieux cimetière, où cette chaude pluie
         Sur l'aubépine en fleurs
    A versé, dans un flot que le soleil essuie,
         Des parfums et des pleurs ;

     Au coucher du soleil, dans le vieux cimetière
         Où, sur chaque tombeau,
    Des bouquets de rayons empourprent l'humble pierre,
         Entrons, il y fait beau !

    Le ciel, bariolé par la...

  •  
    I

    Pas d’amours ! cruelle ironie !
    Car là-bas les jeunes amants
    S’en vont dans la rose agonie
    Du jour, échangeant des serments !

    Ils reviennent de la campagne
    Avec des touffes de lilas
    Dont le parfum les accompagne ;
    Ils vont d’un air heureux et las.

    Devant l’eau jaunâtre et malade
    Ils s’accoudent aux garde-fous
    Pour...