• XXI

    Dans ce jardin antique où les grandes allées
    Passent sous les tilleuls si chastes, si voilées
    Que toute fleur qui s’ouvre y semble un encensoir,
    Où, marquant tous ses pas de l’aube jusqu’au soir,
    L’heure met tour à tour dans les...

  •  
    Dans ces murs où l’écho répète les hoquets
    De son oncle Jérôme, au milieu des laquais
    Qui lui disent encor : « Sire, » le Bonaparte,
    Par instants, fixe un œil abruti sur la carte.
    Il voit les prussiens avancer sur Paris ;
    Il ricane. Un exprès annonce qu’on a pris
    Un village et brûlé dix maisons ; il jubile.
    Laid, vomissant sa joie avec un flot...

  •  
    Le fond de l’océan ravit l’œil des sondeurs :
    Mystérieux printemps, Éden multicolore
    Qui tressaille en silence et ne cesse d’éclore
    Aux frais courants, zéphyrs des glauques profondeurs.

    Lourds oiseaux d’un ciel vert, d’innombrables rôdeurs,
    Dans les enlacements d’une vivante flore,
    Et sous un jour voilé comme une pâle aurore,
    Glissent en...

  • Quelle paix ont les araignées
    Aux solives comme aux carreaux !
    Ici, des ais de tombereaux,
    Là, des pioches et des cognées.

    Je viens d’échanger des poignées
    De main avec les pastoureaux.
    Quelle paix ont les araignées
    Aux solives comme aux carreaux !

    Sur des litières bien soignées
    Je vois ruminer les taureaux
    Qui parfois entre les...

  •  
    La pénombre envahit lentement l’azur clair
    Du grand lac qui s’endort dans la forêt profonde.
    Pas un souffle de vent ne frissonne dans l’air,
    Pas une aile d’oiseau ne palpite sur l’onde.

    Les pâles nénuphars, enlacés sur les eaux,
    Semblent vouloir mourir, pris d’une langueur douce,
    Et les arbres du bord, penchés sur les roseaux,
    Se taisent, tout...

  • Dans la Bresse au sol gris coupé d’étangs limpides,
    Saint Hubert a souvent ri de me voir chasser ;
    Car le râle me nargue en ses crochets rapides,
    Et le lièvre, bien coi, me regarde passer.

    Un jour, las et fourbu, les flancs du carnier vides,
    Je m’étendis à l’ombre et cessai de penser.
    Deux bouleaux balançaient...

  •  
    Au poète Henri Allorge.

    À travers les fourrés de la forêt déserte
    Le clair soleil vernal glissant un chaud rayon,
    Depuis une heure, y teint d’or et de vermillon
    Un frais ruisseau d’argent ― frangé de mousse verte ―
    Qui fredonne et bénit sans doute en sa chanson
    Le clair soleil vernal glissant un chaud rayon
    À travers les fourrés...

  • Dans la grange, sur le sol dur, bossué, battu,
    le char dormait avec des rameaux de chêne cassés
    dans les joints de son bois boueux et fendu.
    La batteuse au ronflement qui s’enfle avait cessé
    de tourner au milieu des bœufs patients,
    et des tas de débris minces jonchaient la terre.

    Les poules du Bon Dieu qui sont les hirondelles,
    et qui avaient leur...

  •              DANS LA GROTTE

            Là ! Je me tue à vos genoux !
            Car ma détresse est infinie,
    Et la tigresse épouvantable d’Hyrcanie
            Est une agnelle au prix de vous.

            Oui, céans, cruelle Clymène,
            Ce glaive qui, dans maints combats,
    Mit tant de Scipions et de Cyrus à bas,
            Va finir ma vie et ma peine...

  •  

    DANS les érables d’or et les érables rouges
    Comme de précieux joyaux les feuilles bougent,
    Et les rameaux légers font sur l’horizon pur
    Des losanges de ciel et des carreaux d’azur.
    La montagne, en octobre, est somptueuse et douce.
    Un désir d’air sylvestre et de beauté m’y pousse.
    J’adore la nuance et le fin coloris.
    L’arbre m’est un plaisir...