• AH ! laissez-moi chanter, oh ! laissez-moi vous dire
    Comme j’ai des rayons, comme j’ai du délire,
    Comme j’ai de l’amour !
    Oh ! laissez-moi vous dire et vous redire encore
    Que la nuit me couvrait, et que voici l’aurore,
    Et que voici le jour !

    Depuis longtemps brillaient au meilleur de mon âme
    Vos longs cheveux flottants, vos yeux baignés de flamme,...

  • N’EST-IL plus rien au monde, être faible, pauvre ombre,
    Pour un espoir d’amour ou de gloire qui sombre ?
    Quand ton dernier espoir mourra, quand tu n’auras
    Rien qui ne t’offre un doute à serrer dans tes bras,
    Seras-tu seul ? Ton cœur devra-t-il croire au vide ?
    Une passion vaine, une amitié perfide,
    Une palme de moins, est-ce là l’univers ?
    Analyse la...

  • APRÈS un jour bien chaud, la nuit était bien fraîche.
    Depuis longtemps, les bœufs avaient gagné la crèche.
    Le pâtre, ayant mangé son pain et bu son lait
    Dans sa hutte dormait près du chien qui hurlait,
    Du reste le silence était profond. Les meules
    Avaient, au fond des champs, l’air triste d’être seules ;
    Les étoiles, d’un ciel sans lune, faisaient choir...

  • CETTE nuit, au hasard, j’ai marché par la ville.
    Tout m’a paru muet, solitaire, tranquille.
    Il faisait clair de lune, il soufflait de doux vents.
    Les poumons se sentaient heureux d’être vivants.
    Dans le ciel comme sur la terre, rien d’acerbe ;
    L’ombre avait des rayons, et les pavés de l’herbe.
    Moi seul, dans ce repos portant un cœur amer,
    J’allais...

  • J’AI longtemps combattu, cherchant si j’étais digne
    D’aimer l’azur du ciel et la blancheur du cygne,
    J’ai fait de ma pensée un examen cruel ;
    Devant moi, tribunal, j’ai paru, criminel.
    Tout ce que j’avais eu de passions mauvaises,
    Ricanements, fureurs, hontes, désirs, fournaises,
    Comme de noirs esprits évoqués à minuit,
    A de nouveau tourné dans ma...

  • SON corps était couvert d’un voile en gaze noire
    Où, sans nombre, on voyait luire des diamants ;
    Son front, plein du frisson magique de la gloire,
    Portait le croissant mince et pur des firmaments.

    Elle représentait vraiment la nuit superbe,
    Avec ses millions d’étoiles, sa douceur,
    Son blanc rayonnement posé sur l’onde ou l’herbe,
    Et son azur sans...

  • POUR sujet préféré, les poètes de Chine
    Ont le saule pleureur se suspendant sur l’eau.
    Ou dirait une vierge à taille souple et fine,
    Que de ses longs cheveux courberait le fardeau.

    Chaque fleur d’une étoile a la pâleur divine ;
    Chaque feuille au zéphir tremble comme un oiseau ;
    Et la nappe immobile où l’arbre se dessine,
    A l’air d’un grand œil triste...

  • AU milieu du brouillard mourait un pâle jour.
    La campagne était nue et muette alentour.

    Et dans l’immensité de cette vapeur grise,
    Sans un point d’horizon, sans un souffle de brise,

    Des gens vêtus de deuil, ayant forme d’humains,
    Cheminaient, en cachant leur cœur avec leurs mains.

    C’était un défilé, terrible en son silence,
    Où le calme effrayait...

  • VOUS me plaisez avec votre lèvre plissée,
    Pour l’homme et pour l’amour révélant vos dédains ;
    J’aime, quand un aveu sort d’une âme oppressée,
    Le regard froid, tombant de vos sourcils hautains.

    Que m’importe le cœur qui sous vos pieds se brise,
    Pourvu que vos beautés gagnent à ce mépris,
    Et que, comme le feu s’anime sous la brise,
    Votre geste irrité...

  • OH ! dans un cœur muet concentrer un désir !
    On a chassé de soi les choses du plaisir,
    Et l’on vit, se masquant de froideur ironique,
    Mais serrant après soi l’invisible tunique
    Dont on frissonne, ainsi qu’au toucher des fers chauds.
    Ivresse de cacher ses espoirs les plus hauts !
    La curiosité venimeuse qui guette,
    Ne sait où vous frapper, va plus loin...