• Refleuris sous mon front, ô fleur de volupté,
    Fleur du rêve païen, fleur vivante & charnelle,
    Corps féminin qu’aux jours de l’Olympe enchanté
    Un cygne enveloppa des blancheurs de son aile.

    L’amour des Cieux a fait chaste ta nudité :
    Sous tes contours sacrés la fange maternelle
    Revêt la dignité d’une chose éternelle
    Et, pour vivre à jamais, s’...

  • Tout dort. Les ponts avec le gaz de leurs lanternes
    Se reflètent dans l’eau profonde. Entre les quais
    Voguent péniblement des bateaux remorqués,
    Et voici l’Hôtel-Dieu que flanquent des casernes.

    Voyez, se découpant sur les nuages ternes,
    Un vague entassement d’édifices tronqués,
    De vieux donjons pareils à des géants masqués,
    D’ogives, de créneaux, de...

  • LA NOURRICE.

    Tu vis ! ou vois-je ici l’ombre d’une princesse ?
    À mes lèvres tes doigts & leurs bagues, & cesse
    De marcher dans un âge ignoré !

    HÉRODIADE.

    De marcher...

  • Sorti pendant le jour dans les bosquets secrets,
    Sous un ciel apaisé, murmurant & plus frais.
    J’observais par endroits quelque arbre des allées,
    Mêlant à de plus verts ses branches dépouillées :
    « Oh ! ce n’est pas l’automne encore (& je passais) ;
    Ces précédents soleils ont donné par accès,
    Leur poids est assez fort pour qu’un feuillage en meure ;...

  • Les amoureux ne vont pas loin :
    On perd du temps aux longs voyages.
    Les bords de l’Yvette ou du Loing
    Pour eux ont de frais paysages.

    Ils marchent à pas cadencés
    Dont le cœur règle l’harmonie,
    Et vont l’un à l’autre enlacés
    En suivant leur route bénie.

    Ils savent de petits sentiers
    Où les fleurs de mai sont écloses ;
    Quand ils...

  • Lecteur, à toi ces vers, graves historiens
    De ce que la plupart appelleraient des riens,
    Spectateur indulgent qui vis ainsi qu’on rêve,
    Qui laisses s’écouler le temps & trouves brève
    Cette succession de printemps & d’hivers,
    Lecteur mélancolique & doux, à toi ces vers.
    Ce sont des souvenirs, des éclairs, des boutades,
    Trouvés au coin de l’...

  • La lascive Pœstum n’a pas laissé d’annales ;
    L’oubli la châtia de son inanité ;
    À peine si Tibulle en un vers a chanté
    Les roses qui jonchaient ses molles saturnales.

    Dans une plaine morne, où grincent les rafales,
    Où la Mal’aria verse un souffle empesté,
    Le néant la coucha de ses mains sépulcrales,
    Et le passant se dit : « Elle n’a pas été. »

    ...

  • Comme une sombre histoire encor douce & chérie
    Laisse nos deux noms sommeiller !
    Du mal d’avoir aimé je ne suis point guérie :
    Je ne veux point me réveiller !

    Prends garde à ton regard qui peut...

  • La rivière aux flots bleus rêve les soirs d’été.
    Elle dessine au loin sa courbe gracieuse
    Pour se perdre dans l’ombre ; & le saule & l’yeuse
    Reflètent leurs rameaux dans sa limpidité.

    L’air est sans bruit, le ciel plein de sérénité.
    La rive se recueille & dort silencieuse.
    Tout repose. Voici l’heure mystérieuse
    Faite de calme intense...

  • J’aime tes belles mains longues & paresseuses,
    Qui, pareilles au lis, n’ont jamais travaillé,
    Mais savent le secret des musiques berceuses
    Qui parlent à voix lente au cœur émerveillé. —
    J’aime tes belles mains longues & paresseuses.

    J’aime tes petits pieds vifs & spirituels,
    Petits pieds éloquents de la cheville aux pointes,
    Que les saints...