• Oh ! si l'homme naissait deux fois à la lumière,
    Que je tenterais peu les destins du nocher !
    Et de quel soin plus doux que ma chaîne première,
    J'attacherais mes jours au seuil de la chaumière
    Comme l'huître au rocher.

    Non, je ne suivrais plus une proue écumante
    Qui broie en poudre d'or les flots étincelants,
    Et je n'épierais plus, de la vague...

  • Je suis un pâle enfant du vieux Paris, et j'ai
    Le regret des rêveurs qui n'ont pas voyagé.
    Au pays bleu mon âme en vain se réfugie,
    Elle n'a jamais pu perdre la nostalgie
    Des verts chemins qui vont là-bas, à l'horizon.
    Comme un pauvre captif vieilli dans sa prison
    Se cramponne aux barreaux étroits de sa fenêtre
    Pour voir mourir le jour et pour le voir...

  • Antonio di Sandro orefice.

    Le vaillant Maître Orfèvre, à l'oeuvre dès matines,
    Faisait, de ses pinceaux d'où s'égouttait l'émail,
    Sur la paix niellée ou sur l'or du fermail
    Épanouir la fleur des devises latines.

    Sur le Pont, au son clair des cloches argentines,
    La cape coudoyait le froc et le camail ;
    Et le soleil montant en un ciel de...

  • Je suis tel qu'un ponton sans vergues et sans mâts,
    Aventureux débris des trombes tropicales,
    Et qui flotte, roulant des lingots dans ses cales,
    Sur une mer sans borne et sous de froids climats.

    Les vents sifflaient jadis dans ses raille poulies.
    Vaisseau désemparé qui ne gouverne plus,
    Il roule, vain jouet du flux et du reflux,
    L'ancien explorateur des...

  • Ce bon vieux pont, sous ses trois arches,
    En a déjà bien vu de l'eau
    Passer verte avec du galop
    Ou du rampement dans sa marche.

    Il connaît le pas, la démarche
    De l'errant qui porte un ballot,
    Du petit berger tout pâlot
    Et du mendiant patriarche.

    Au creux de ce profond pays,
    Entre ces grands bois recueillis
    Où l'ombre humide...

  • Au fil de l'eau coulant sans bruit,
    Triste et beau comme un vieux monarque,
    Perche en main, débout dans sa barque,
    Le pêcheur aspirait la nuit.

    Son extase mal contenue
    Rivait, pleins de larmes, ses yeux
    Au grand miroir mystérieux
    Où tremblait l'ombre de la nue.

    L'astre pur, à frissons follets,
    Jetait prodigue ses reflets
    A...

  • Le cabaret qui n'est pas neuf
    Est bondé des plus vieux ivrognes
    Dont rouge brique sont les trognes
    Entre les grands murs sang de boeuf.
    L'un d'entre eux, chenu comme un oeuf,
    D'une main sur la table cogne,
    Et, son verre dans l'autre, il grogne :
    " Aussi vrai que j'suis d'Châteauneuf !
    J'reste un bon coq, et l'diab' me rogne !
    Je r'prendrais...

  • J'ai lu chez un conteur de Fables,
    Qu'un second Rodilard, l'Alexandre des Chats,
    L'Attila, le fléau des Rats,
    Rendait ces derniers misérables :
    J'ai lu, dis-je, en certain Auteur,
    Que ce Chat exterminateur,
    Vrai Cerbère, était craint une lieue à la ronde :
    Il voulait de Souris dépeupler tout le monde.
    Les planches qu'on suspend sur un léger appui,
    ...

  • Le Lion, terreur des forêts,
    Chargé d'ans et pleurant son antique prouesse,
    Fut enfin attaqué par ses propres sujets,
    Devenus forts par sa faiblesse.
    Le Cheval s'approchant lui donne un coup de pied ;
    Le Loup un coup de dent, le Boeuf un coup de corne.
    Le malheureux Lion, languissant, triste, et morne,
    Peut a peine rugir, par l'âge estropié.
    Il attend...

  • Quien no ama, no vive.


    Oh ! qui que vous soyez, jeune ou vieux, riche ou sage,
    Si jamais vous n'avez épié le passage,
    Le soir, d'un pas léger, d'un pas mélodieux,
    D'un voile blanc qui glisse et fuit dans les ténèbres,
    Et, comme un météore au sein des nuits funèbres,
    Vous laisse dans le coeur un sillon radieux ;

    Si vous ne connaissez que...