• XV

    Cantique de la Vierge dans « Sœur Béatrice »

    À toute âme qui pleure,
    À tout péché qui passe,
    J’ouvre au sein des étoiles
    Mes mains pleines de grâces.

    Il n’est péché qui vive
    Quand l’amour a parlé;
    Il n’est âme qui meure
    Quand l’amour a pleuré…

    Et si l’amour s’égare
    Aux sentiers d’ici-bas,...

  • Comme un voleur de nuit, chez vous la mort avide
    S’est glissée ; et voilà qu’il dort sous le gazon
    Le beau petit enfant, lui qui, dans la maison,
    Tenait si peu de place… et laisse un si grand vide !

    Quand le fil de nos jours lentement se dévide
    Sur le fuseau fatal, et que notre toison
    Tombe mûre et jaunie à l’arrière-saison,
    Insensé qui se plaint du...

  • Tout est mort ! ― vers d’autres climats
    Les oiseaux vont chercher fortune,
    Et la terre, sous les frimas,
    Est blanche, au loin, comme la lune.

    Le vent, pareil à cent taureaux,
    Mugit au seuil de ma demeure ;
    Le givre a brodé mes carreaux ;
    À mon foyer, la bûche pleure :

    — « Je me souviens !… je me souviens !…
    Au pied des monts… dans le...

  •  
    En hiver la terre pleure ;
    Le soleil froid, pâle et doux,
    Vient tard, et part de bonne heure,
    Ennuyé du rendez-vous.

    Leurs idylles sont moroses.
    — Soleil ! Aimons ! ― Essayons.
    Ô terre, où donc sont tes roses ?
    — Astre, où donc sont tes rayons ?

    Il prend un prétexte, grêle,
    Vent, nuage noir ou blanc,
    Et dit : ― C’est la nuit...

  • Vous me grondez, amis, de tant parler des morts !
    Ma voix, de jour en jour, traîne plus monotone :
    Tels, quand l’arbre a senti les rafales d’automne,
    Les rameaux dépouillés ont de plus sourds accords.

    J’en parle encor trop peu : c’est le seul de mes torts !
    Si je songeais à ceux dont le départ m’étonne,
    Combien je maudirais ma gaîté qui détonne !
    Le...

  •  
    O mon pâle rêveur ! me disait une femme.
    Toi dont le cœur est mort dans ton sein déchiré,
    Et dont l’œil cependant reluit sous tant de flamme,
    Sceptique de vingt ans, as-tu jamais pleuré ?

    Hélas ! lui répondis-je, aux faiblesses humaines
    Je n’ai pu m’arracher encore tout entier ;
    La suprême apathie a de vastes domaines
    Où ne s’est point encor...

  •     Toujours je pleure au nom de mon enfant :
        Sans sa beauté rien n’est beau dans ma vie.
    Du monde et de ses biens, c’est le seul que j’envie,
    Mais je ne l’attends plus, la mort me le défend.

        Je le revois dans la fleur éphémère ;
        Elle apparaît pour sourire et périr :
    Comme elle, mon enfant, sur le sein de sa mère,
    Après avoir souri, se...

  • J'ai presque perdu la vue
    A suivre le jeune oiseau
    Qui, du sommet d'un roseau,
    S'est élancé vers la nue.

    S'il ne doit plus revenir,
    Pourquoi m'en ressouvenir ?

    Bouquet vivant d'étincelles,
    Il descendit du soleil
    Eblouissant mon réveil
    Au battement de ses ailes.

    S'il ne doit plus revenir,
    Pourquoi m'en ressouvenir ?
    ...

  • Il pleure dans mon coeur
    Comme il pleut sur la ville ;
    Quelle est cette langueur
    Qui pénètre mon coeur ?

    Ô bruit doux de la pluie
    Par terre et sur les toits !
    Pour un coeur qui s'ennuie,
    Ô le chant de la pluie !

    Il pleure sans raison
    Dans ce coeur qui s'écoeure.
    Quoi ! nulle trahison ?...
    Ce deuil est sans raison.

    C...

  • Je chante et pleure, et veux faire et défaire,
    J'ose et je crains, et je fuis et je suis,
    J'heurte et je cède, et j'ombrage et je luis,
    J'arrête et cours, je suis pour et contraire,

    je veille et dors, et suis grand et vulgaire,
    Je brûle et gèle, et je puis et ne puis,
    J'aime et je hais, je conforte et je nuis,
    Je vis et meurs, j'espère et...