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    I. ― LES RIVIÈRES

    Te rappelles-tu nos calmes rivières
    Qui se répandaient, limpides et fières,
    A travers les champs fleuris de houblons,
    Dans le beau pays où les toits sont blonds.
    Te rappelles-tu nos rivières lentes
    Qui traînaient au loin leurs eaux indolentes,
    Tristes de quitter un si doux climat.
    A peine une barque avec un long mât...

  • Ni pardon ni répit, dit le monde,
    Plus de place au sénat du loisir !
    On rend grâce et justice au désir
    Qui te prend d’une paix si profonde,
    Et l’on eût fait trêve avec plaisir,
    Mais la guerre est jalouse : il faut vivre
    Ou mourir du combat qui t’enivre.

    Aussi bien tes vœux sont absolus
    Quand notre art est un mol équilibre.
    Nous donnons un...

  • Je parle de Dieu — mais pourtant
    est-ce que j’y crois ? — À cinq ans
    on me disait : tiens un croquant...

    Va le manger avec Marie
    aux vêpres. Sois bien sage et prie
    le bon Dieu, la vierge Marie.

    — Puis c’était la procession
    que la bonne et moi nous suivions,
    et de belles fleurs en coton

    dans des vases de loterie.
    Les petites filles...

  • Ô frères ! tristes lys, je languis de beauté
    Pour m’ètre désiré dans votre nudité,
    Et vers vous, Nymphe, Nymphe, ô Nymphe des fontaines,
    Je viens au pur silence offrir mes lames vaines.

    Un grand calme m’écoute, où j’écoute l’espoir.
    La voix des sources change et me parle du soir ;
    J’entends l’herbe d’argent grandir dans l’ombre sainte,...

  • Je vois un groupe sur la mer.
    Quelle mer ? Celle de mes larmes.
    Mes yeux mouillés du vent amer
    Dans cette nuit d’ombre et d’alarmes
    Sont deux étoiles sur la mer.

    C’est une toute jeune femme
    Et son enfant déjà tout grand.
    Dans une barque où nul ne rame,
    Sans mât ni voile, en plein courant…
    Un jeune garçon, une femme !

    En plein...

  • Parle, parle, Seigneur, ton serviteur écoute :
    Je dis ton serviteur, car enfin je le suis ;
    Je le suis, je veux l'être, et marcher dans ta route
    Et les jours et les nuits.

    Remplis-moi d'un esprit qui me fasse comprendre
    Ce qu'ordonnent de moi tes saintes volontés,
    Et réduis mes desirs au seul desir d'entendre
    Tes hautes verités.

    Mais...

  • Comme parle et se tait une fille des hommes
    Comme de grands secrets sont formés par son corps
    Quel étrange plaisir, à cette heure où nous sommes
    Aussi libres de tout que les esprits des morts,

    Aussi légers, abandonnés, sûrs de nous-mêmes,
    Aussi loin de la vie aux doux yeux égarés,
    Bien sages, sans vouloir connaître qui nous aime,
    Comme de beaux...

  • Fillis, auprès de cet ormeau
    Où paissait son petit troupeau,
    Étant toute triste et pensive,
    De son doigt écrivait un jour
    Sur le sablon de cette rive :
    Alcidon est mon seul amour.

    Je ne devais pas m'assurer
    De voir sa promesse durer
    Parce qu'en chose plus légère
    Ni plus ressemblante à sa foi,
    L'ingrate et parjure bergère
    Ne...

  • On vit, on parle, on a le ciel et les nuages
    Sur la tête ; on se plaît aux livres des vieux sages ;
    On lit Virgile et Dante ; on va joyeusement
    En voiture publique à quelque endroit charmant,
    En riant aux éclats de l'auberge et du gîte ;
    Le regard d'une femme en passant vous agite ;
    On aime, on est aimé, bonheur qui manque aux rois !
    On écoute le chant...

  • Comme tel qui parle de sa mère
    lui ressemble en parlant,
    ce pays ardent se désaltère
    en se souvenant infiniment.

    Tant que les épaules des collines
    rentrent sous le geste commençant
    de ce pur espace qui les rend
    à l'étonnement des origines.