• J'ai beau vous arrêter, ma remontrance est vaine;
    Allez, partez, mes Vers, dernier fruit de ma veine.
    C'est trop languir chez moi dans un obscur séjour :
    La prison vous déplaît, vous cherchez le grand jour;
    Et déja chez Barbin, ambitieux libelles,
    Vous brûlez d'étaler vos...

  • Docte abbé, tu dis vrai ; l’homme, au crime attaché,
    En vain, sans aimer Dieu, croit sortir du péché.
    Toutefois, n’en déplaise aux transports frénétiques
    Du fougueux moine auteur des troubles germaniques,
    Des tourments de l’enfer la salutaire peur
    N’est pas toujours l’effet d’une noire vapeur
    Qui, de remords sans fruit agitant le coupable,
    Aux yeux de...

  • Épopée, oui, et non point tragédie !

    Noires sont les nouvelles qui arrivent de notre pays,
    Plus noires que la noirceur réunie de toutes les nuits
    Qui depuis la naissance du monde ont masqué le soleil...
    Les fleuves, maintenant, y sont rouges du sang de nos martyrs,
    — On dirait les avenues de la Mort couvertes de roses douloureuses ;
    Les plaines y sont...

  •  
    Un lion avait pris un enfant dans sa gueule,
    Et, sans lui faire mal, dans la forêt, aïeule
    Des sources et des nids, il l'avait emporté.
    Il l'avait, comme on cueille une fleur en été,
    Saisi sans trop savoir pourquoi, n'ayant pas même
    Mordu dedans, mépris fier ou pardon suprême ;
    Les lions sont ainsi, sombres et généreux.
    Le pauvre petit prince...

  •  
    ....Babel est prise, Bel couvert
    de confusion ; Mérodach est vaincu...

    Jérémie, L, 2.

    Depuis les jours sans nombre où les Rois très antiques
    Ont nivelé le sol et détourné les eaux,
    La Tour se dresse au loin sous les cieux prophétiques.

    Des peuples disparus ont traîné par monceaux
    Le bitume et la brique et l’argile à sa...

  •  
    Elle est fragile à caresser,
    L’épousée au front diaphane,
    Lis pur qu’un rien ternit et fane,
    Lis tendre qu’un rien peut froisser,
    Que nul homme ne peut presser,
    Sans remords sur son cœur profane.

    La main digne de l’approcher
    N’est pas la main rude qui brise
    L’innocence qu’elle a surprise
    Et se fait jeu d’effaroucher,
    Mais la...

  • L’épouseur de famille
              Fuit la fille
    Qui n’a pour dot qu’un cu
              Sans écu.
    Aussi, quoique jolie,
              Azélie
    Se trouve vierge encor
              Faute d’or.
    Le désir la picote
              Sous sa cotte,
    Et souvent elle doit
              Mettre un doigt
    Qui longtemps y repose
              Sur sa rose....

  •  

    L’Invisible, celui qui règne dans les cieux,
    Assembla ses enfants pour lui chanter sa gloire ;
    Et Satan était là, qui se dressait près d’eux.

    Et le Très-haut lui dit : « D’où viens-tu ? — mon histoire
    Est vieille, répondit l’adversaire : j’ai fait
    Tout le tour de ton oeuvre avec mon aile noire.

    « J’ai délié l’esprit que ta règle étouffait ;
    ...

  •  
    L’érable si haut dans l’espace
    Dresse son faîte audacieux,
    Que le bouvreuil, même à voix basse,
    Y parle avec l’oiseau des cieux.

    Il est plein de sève et de force.
    L’ouragan ne peut le ployer ;
    Pourtant les fibres de son torse
    Sont aussi souples que l’acier.

    Il est rugueux comme le chêne,
    Et plus droit que le peuplier.
    Une...

  •  

    Nature, où sont tes Dieux ? Ô prophétique aïeule,
    Ô chair mystérieuse où tout est contenu,
    Qui pendant si longtemps as vécu de toi seule
    Et qui sembles mourir, parle, qu’est devenu
    Cet âge de vertu que chaque jour efface,
    Où le sourire humain rayonnait sur ta face ?
    Où s’est enfui le chœur de tes Olympiens ?
    Ô Nature à présent désespérée et...