• Je m’ignorais encor, je n’avais pas aimé.
    L’amour ! si ce n’est toi, qui pouvait me l’apprendre ?
    À quinze ans, j’entrevis un enfant désarmé ;
    Il me parut plus folâtre que tendre :
        D’un trait sans force il effleura mon cœur ;
        Il fut léger comme un riant mensonge ;
    Il offrait le plaisir, sans parler de bonheur ;
        Il s’envola. Je ne perdis qu...

  • En Daulphiné Ceres faisoit encor moisson,
    Estant a Millery Bacchus en sa boisson :
    Parquoy ie puis iuger, voyantz les vins si vertz,
    Que Venus sera froide encor ces deux hyuerz.

    En Dauphiné Cérès faisait encore moisson,
    Étant à Millery Bacchus en sa boisson :
    Par quoi je puis juger, voyant les vins si verts,
    Que Vénus sera froide encore ces deux...

  • Je me demande encor — cette tête que j’ai !
    Où, comme débuta, — bien sür quelque soir gai —
    Cette liaison qui m’a fait ton esclave ivre.
    Tu ne t’en souviens plus non plus. Rayons du livre
    De Mémoire ce jour des jours, ou plutôt non,
    Il ne sera pas dit, ou j’y perdrai mon nom,
    Que je n’aurai pas fait au moins le nécessaire
    Pour retrouver un peu de cet...

  •  
    Souffre un moment encor ; tout n'est que changement ;
    L'axe tourne, mon cœur ; souffre encore un moment.
    La vie est-elle toute aux ennuis condamnée ?
    L'hiver ne glace point tous les mois de l'année,
    L'Eurus retient souvent ses bonds impétueux ;
    Le fleuve, emprisonné dans des rocs tortueux,
    Lutte, s'échappe, et va, par des pentes fleuries,
    S'...

  • De ces terrasses où, le soir, il flotte encor
    Sur la terre assombrie un dernier voile d'or,
    Nous regardons, tous deux, longuement, en silence,
    Le monde qui s'efface et l'azur qui s'endort.

    Il se tient près de moi. Ses grandes ailes blanches
    Sont closes. Il songe ; et nul ne sait à quoi songent
    Les Anges. Tendrement, près de lui je me penche
    Sur l'...

  • Je voy bien, ma Dourdouigne, encor humble tu vas :
    De te monstrer Gasconne, en France, tu as honte.
    Si du ruisseau de Sorgue on fait ores grand conte,
    Si a il bien esté quelquefois aussi bas.

    Voys tu le petit Loir comme il haste le pas ?
    Comme desjà parmy les plus grands il se conte ?
    Comme il marche hautain d'une course plus prompte
    Tout à costé...

  • Tant je l'aimais qu'en elle encor je vis
    Et tant la vis, que malgré moi, je l'aime
    Le sens, et l'âme y furent tant ravis,
    Que par l'Oeil fault, que le coeur la désaime.

    Est-il possible en ce degré suprême
    Que fermeté son oultrepas révoque ?

    Tant fut la flamme en nous deux réciproque
    Que mon feu luit, quand le sien clair m'appert,
    ...

  • Tu sommeilles ; je vois tes yeux sourire encor.
    Ta gorge, ainsi deux beaux ramiers prennent l'essor,
    Se soulève et s'abaisse au gré de ton haleine.
    Tu t'abandonnes, lasse et nue et tout en fleur,
    Et ta chair amoureuse est rose de chaleur.
    Ta main droite sur toi se coule au creux de l'aine,
    Et l'autre sur mon coeur crispe ses doigts nerveux.
    Ce...

  • Baise m'encor, rebaise-moi et baise ;
    Donne m'en un de tes plus savoureux,
    Donne m'en un de tes plus amoureux :
    Je t'en rendrai quatre plus chauds que braise.

    Las ! te plains-tu ? Çà, que ce mal j'apaise,
    En t'en donnant dix autres doucereux.
    Ainsi, mêlant nos baisers tant heureux,
    Jouissons-nous l'un de l'autre à notre aise.

    Lors double vie...

  • Puisque j'ai mis ma lèvre à ta coupe encor pleine ;
    Puisque j'ai dans tes mains posé mon front pâli ;
    Puisque j'ai respiré parfois la douce haleine
    De ton âme, parfum dans l'ombre enseveli ;

    Puisqu'il me fut donné de t'entendre me dire
    Les mots où se répand le coeur mystérieux ;
    Puisque j'ai vu pleurer, puisque j'ai vu sourire
    Ta bouche sur ma bouche...