• La plus douce des voix qui vibraient sous le ciel
    Se tait: les rossignols ailés pleurent le frère
    Qui s'envole au-dessus de l'âpre et sombre terre,
    Ne lui laissant plus voir que l'être essentiel,

    Esprit qui chante et rit, fleur d'une âme sans fiel.
    L'ombre élyséenne, où la nuit n'est que lumière,
    Revoit, tout revêtu de splendeur douce et fière,
    ...

  •  
    Sur ce palmier qui te balance,
    Dors, tendre fruit de mon amour ;
    Mes bras, quelques instants, ont porté ton enfance,
    Ce fragile palmier te soutient à son tour ;
    Ainsi me berçait l’espérance.
    Dors en paix sur ce frêle appui.
    Si le vent vient gémir sur ta tombe légère,
    Le vent te dira que ta mère
    Gémit sans cesse comme lui.
    Aussi...

  • XXXVIII

    ÉCRIT SUR LE TOMBEAU D’UN PETIT ENFANT AU BORD DE LA MER

    Vieux lierre, frais gazon, herbe, roseaux, corolles ;
    Église où l’esprit voit le Dieu qu’il rêve ailleurs ;
    ...

  •  
    Prends cette rose, et sur ton cœur
    Réchauffe-la, quoique flétrie ;
    Sous d’autres cieux, triste et rêveur,
    Pour te l’offrir je l’ai cueillie.
    Elle a vécu ; — mais à tes yeux
    Sa fleur encor paraîtra belle,
    Si tu te dis qu’aux mêmes lieux
    Ton souvenir vivait comme elle.

    Sur un tombeau, que de vieux pins
    Couvrent d’une ombre ténébreuse...

  •  
          Près de la pierre close
          Sous laquelle repose
          Théophile Gautier,
               (Non tout entier,

          Car par son œuvre altière
          Ce dompteur de matière
          Est comme auparavant
               Toujours vivant,)

          Regardant cette tombe
          De leurs yeux de colombe,
          Les Muses vont pleurant...

  •  
    C’était toute douceur et nuance et sourdine
    De lys purs qui seraient sensitives, et d’une
    Figure de clarté qui serait clair de lune,
    Figure de Béguine ou de Visitandine.

    C’était tout falbalas et brumes en écharpes ;
    C’était toute musique, en pleurs d’être charnelle ;
    Et frissons d’une harpe qui serait une aile ;
    Car les ailes du cygne ont la...

  • En ce temps-là, Jésus était dans la Judée ;
    Il avait délivré la femme possédée,
    Rendu l’ouïe aux sourds et guéri les lépreux ;
    Les prêtres l’épiaient et parlaient bas entre eux.
    Comme il s’en retournait vers la ville bénie,
    Lazare, homme de bien, mourut à Béthanie.
    Marthe et Marie étaient ses sœurs ; Marie, un jour,
    Pour laver les pieds nus du maître...

  •  
    I

    O harpe qui dors sur la tête
    Immense du poëte-roi,
    Veuve immortelle du prophète,
    Un jour encore éveille-toi !
    Quoi ! dans cette innombrable foule
    Des races dont le pied te foule,
    Il n’est plus une seule main
    Qui te remue et qui t’accorde,
    Et qui puisse un jour sur ta corde
    Faire éclater l’esprit humain ?

    Es-tu comme...

  • Quand je m’endormirai sous la splendeur des astres,
    Mes strophes flamboieront auprès de mon cercueil ;
    Les torchères de fer de mon farouche orgueil
    Jetteront dans le vent la pourpre des désastres ;

    Et les aigles du Verbe, apaisant leur essor,
    Grouperont leurs faisceaux en un vol de victoire,
    Pendant que se tairont, autour de ma mémoire,
    Les trompettes...

  •  
    L’homme qu’on a cru mort, de son sommeil profond
    S’éveille. Un frisson court dans sa chair engourdie ;
    Il appelle. Personne ! Et sa plainte assourdie
    Lui semble retomber d’un étrange plafond.

    Seul dans le vide épais que les ténèbres font,
    Il écoute, et, roulant pleine de léthargie
    Sa prunelle par l’ombre et la peur élargie,
    Il sonde éperdument...