• Enseveli dans l’herbe verte
    Sur la lisière d’un grand bois,
    Je recueille, l’oreille ouverte,
    Tous les chants et toutes les voix.

    Tandis que dans un ciel d’opale
    Le soleil rouge disparaît ;
    Souvent je penche mon front pâle
    Vers le sol noir de la forêt.

    Et les yeux fixés sur la mousse,
    Spectacle charmant et profond,
    Je regarde l’herbe...

  • Le train stoppa ; c’était la station de Sèvres.

    Assis dans mon wagon, la cigarette aux lèvres,
    En jetant un regard dehors, je remarquai,
    Près de la porte en bois ouverte sur le quai,
    Un groupe de trois sœurs vraiment presque pareilles :
    Mêmes cheveux au vent derrière les oreilles,
    Mêmes chapeaux à fleurs, mêmes robes d’été,
    Même air de bonne humeur et...

  • La femme de Danton, douce même à la mort,
    Paisible elle s’est endormie
    Comme un lac par un soir sans brise ou dans un port
    Une voile en pleine accalmie.

    Quoi ! cette âme, la joie aimante du foyer...

  • Ma mère, je n’aurai ni l’épouse semblable
    A la vigne appuyée au mur de la maison,
    Ni les enfants rangés tout autour de la table
    Tels que des oliviers dans leur jeune saison.

    Béni par le Très-Haut, l’homme simple et robuste
    S’accroît et s’enrichit, et ses greniers sont pleins.
    Il est dit, non de tous, mais seulement du Juste :
    « Il mangera le fruit des...

  • Si tu disais : « Elle est sur l’Alpe nébuleuse
    Ou dans le fond des mers la fleur que je voudrais » ;
    J’irais te la chercher, cette fleur fabuleuse,
    Dans la mer, dans le ciel, et te l’apporterais !

    S’il te fallait mon sang, tout mon sang pour te plaire,
    Tes beaux petits pieds blancs, je les y baignerais.
    Oui, si tu me disais dans un jour de colère :
    « ...

  • Il soufflait cette nuit un grand vent de jeunesse.
    Ah ! bonsoir aux soucis maintenant ! Notre Bresse
    A mis à son corsage une fleur de pêcher.
    La vieille fée en Saône a jeté sa béquille,
    Et rit à pleine voix comme une jeune fille.
    Hourrah ! l’amour au bois, l’amour va se cacher !

    Et me voilà parti. Gai comme l’alouette,
    Je m’en vais, fredonnant quelque...

  • En Dordogne, au bas d’un coteau
    Et sur le bord d’une rivière,
    J’habite un semblant de château,
    A peine une gentilhommière.

    Rien n’est paisible et retiré
    Comme cette chère demeure
    Où mes aïeux ont expiré :
    Mon destin veuille que j’y meure !

    Il est vrai, le toit affaissé
    A plus de cent tuiles brisées,
    Les créneaux, roulés au fossé,...

  • On vend du muguet blanc sous les portes cochères.
    Le soleil est doux comme une lune de miel.
    Les arbres reverdis font l’éloge du ciel,
    Et les prédicateurs descendent de leurs chaires.

    Il pleut de la gaîté. Tout le monde a vingt ans.
    Le cœur bat follement au fond de la poitrine ;
    La main tremble ; on sourit sans motif ; la narine
    Se grise des parfums...

  • Seront-ils toujours là quand nous disparaîtrons ?
    Les voilà, roidissant leurs vénérables troncs
    Qui des vents boréens ont lassé les colères,
    Eux, les arbres, longs murs de héros séculaires
    Durcis aux noirs assauts des hivers meurtriers,
    Inexpugnable bloc d’immobiles guerriers
    Qui sous le choc prochain des rafales nocturnes
    Pour un instant se font tout...

  • O pays des glaciers, des lacs, des hommes libres,
    Air pur où l’étranger vient retremper ses fibres,
    Sublime réservoir de neige et de granit
    D’où s’épanchent sans fin les fleuves du vieux monde,
    O Suisse ! accepte ici ma tendresse profonde :
    Je t’admire, je t’aime et mon cœur te bénit.

    Ton front est couronné de neiges éternelles ;
    La foudre et le...