• Par ces vieux soirs des mois vides, le train circule
    De forêt en village et de bruyère en bourg ;
    Le train grinçant et dur, le train torpide et lourd
    Qui semble charrier les blocs du crépuscule.

    Les longs et noirs wagons roulent parmi l’hiver,
    — Ressorts bandés, essieux tendus, bâches gonflées,
    Trouant l’espace entier d’une brusque vallée
    De chocs, de...

  • Ô rare invention où mon cœur se complaît,
    S’attendrit et se pâme !
    Un journal qui devient un aliment complet
    Pour le corps, sinon l’âme !

    Un papier comestible et digestible, enfin !
    ...

  • Lorsque l’été flambant brûle la ville lasse,
    Et le peuple pointu des toits capricieux,
    Le vieux gardien du vieux beffroi suit de ses yeux
    L’ombre lente qui fait le tour de la grand’place.

    Et c’est d’abord, au jour levé,
    Les trois pignons des Trois Rois Mages,
    Laissant flotter leur triple image
    Sur les bosses du lourd pavé.

    Vers dix heures, c’...

  • Au long des cours, des impasses et des venelles

    Des vieux quartiers retraits,
    La pluie
    Semble à jamais

    Chez elle.

    Elle y tombe depuis novembre,

    Continûment, à petit bruit,
    Elle y tombe, le jour, la nuit ;
    Et nul ne sait quand elle aura fini
    De...

  • Quelqu’un qui jamais ne se trompe,
    M’appelle juif… Moi, juif ? Pourquoi ?
    Je suis chrétien, sans que je rompe
    Le pain bénit à son de trompe,
    Bien qu’en mon trou… je reste coi.

    Je suis juif, ah ! c’est bien possible !
    Je n’ai le nez spirituel
    Ni l’air résigné d’une cible ;
    Je ne montre un cœur insensible.
    Tout juif est-il en Israël ?

    ...
  •  
    Le soleil brûle au fond de l’immense ciel bleu.
    Pas un lambeau de vent ne traîne sur les ondes.
    La canicule étreint dans un cercle de feu
    Jusqu’aux sapins touffus des savanes profondes.

    Les ruisseaux ont cessé leurs chants dans les vallons ;
    Les coteaux sont jaunis, les sources desséchées ;
    Le grillon, accablé, se tait sur les sillons ;
    Le...

  •  
    Très tard le soleil sombre à l’horizon fumant,
    Qui garde dans la nuit ses luisantes traînées.
    Le fécond Prairial sous un clair firmament
    Prodigue la splendeur des plus longues journées.

    Une flamme de vie emplit l’immensité.
    Le bleu de l’eau miroite. Adieu la nostalgie !
    L’Été s’épanouit dans toute sa beauté,
    Dans toute sa verdeur et toute sa...

  • Quoi prévaut ? Culotte ou jupe
    Telle est l’âpre question
    Qui pour le moment occupe
    La publique attention.

    En attendant que dans Rome
    On en ait concilé, je
    Crois que si, tel un homme,
    Tu vas enjambant ton pneu,

    Ô cyclewoman lectrice,
    Une culotte convient
    Plutôt à cet exercice...

  • J’aime la boue humide et triste où se reflète
    Le merveilleux frisson des astres, où le soir
    Revient se contempler ainsi qu’en un miroir
    Qui découvre à demi son image incomplète.

    J’aime la boue humide où la Ville inquiète
    Détache ses lueurs...