• Les toits semblent perdus
    Et les clochers et les pignons fondus,
    Par ces matins fuligineux et rouges,
    Où, feux à feux, des signaux bougent.

    Une courbe de viaduc énorme
    Longe les quais mornes et uniformes ;
    Un train s’ébranle immense et las.

    Au loin, derrière un mur, là-bas,
    Un steamer rauque avec un bruit de corne.

    ...
  • Les jours de rage militaire,
    Quand vibre et siffle et passe et se répand partout
    L’obus précis, ardent, volant et fou,
    Dites, les gens, les pauvres gens, entendez-vous
    ...

  •  
    Un bon curé de la Corrèze
    Vivait, content de son destin,
    Quand l’évêque du diocèse
    Vint le surprendre un beau matin.

    Le prélat fit bonne figure
    Et lui dit : « Mon fils, aujourd’hui,
    « Je déjeune et dîne à la cure,
    « Et j’espère y passer la nuit ».

    Sur le champ, Monseigneur l’évêque
    De visiter — c’était son droit —
    Le salon,...

  • Quand, dans ses haltes indécises,
    Le genre humain, tout effaré,
    Ebranlait les vastes assises
    Du monde mal équilibré ;

    Étouffant les vieilles doctrines,
    Quand le ferment des jours nouveaux
    Montait dans toutes les poitrines,
    Et germait dans tous les cerveaux ;

    Quand l’homme, clignant la paupière
    Devant chaque rayon qui luit,
    De son...

  • Tout dans l'immuable Nature
    Est miracle aux petits enfants :
    Ils naissent, et leur âme obscure
    Éclôt dans des enchantements.

    Le reflet de cette magie
    Donne à leur regard un rayon.
    Déjà la belle illusion
    Excite leur frêle énergie.

    L'inconnu, l'inconnu divin,
    Les baigne comme une eau profonde;
    On les presse, on leur parle en vain :...

  • L’ombre noyait les bois. C’était un soir antique.

    Les dieux puissants vaincus par le Dieu pathétique
    Après mille ans d’Olympe avaient quitté la terre,
    Et la syrinx pleurait dans Tempé solitaire.
    Sur la mer en émoi, vers l’orient mystique,

    Une aube se levait. Pleins de souffles étranges
    Les chênes remuaient des branches prophétiques,
    Et les grands lys...

  • L’aurore a la pâleur verdâtre d’une morte,
    Elle semble une frêle et tremblante Alkestis
    Qui, les pas vacillants, vient frapper à la porte
    Où l’amour l’accueillait en souriant, jadis.

    Elle a quitté les flots qui roulent des étoiles,
    Les...

  •  
    Lété, lorsque les longs dimanches
    Tintaient dans les clochers nombreux,
    Tu écoutais tes amoureux,
    La belle fille aux fortes hanches.

    ...

  • Voici le dernier mois vermeil :

    Lunes rouges, pourpres soleils.

    Et bellement, le long des haies,
    Comme des clous, pointent les baies ;
    Et brusquement c’est le coq clair,
    Qui déchire d’un spasme et d’un éclair
    Et d’un grand cri de violence
    Le mol silence
    Dont les voiles pendent et s’affaissent dans l’air....

  • Il n’avait pas dix ans. Je gage qu’elle, à peine,
    Sur son front virginal accusait la douzaine…
    Délaissant leurs troupeaux, tout en haut des rochers,
    Ils se sentaient heureux de vivre, étant bergers !
    Chargé de lourds embruns et de senteurs marines,
    L’âcre vent de Gwalarn dilatait leurs narines,
    Et leur mettait au cœur un besoin d’être fol,
    De rire, de...