• Beau monstre de Nature, il est vrai, ton visage
    Est noir au dernier point, mais beau parfaitement :
    Et l'Ebène poli qui te sert d'ornement
    Sur le plus blanc ivoire emporte l'avantage.

    Ô merveille divine, inconnue à notre âge !
    Qu'un objet ténébreux luise si clairement ;
    Et qu'un charbon éteint, brûle plus vivement
    Que ceux qui de la flamme entretiennent...

  • Ô, entre tes beautez, que ta constance est belle !
    C'est ce coeur asseuré, ce courage constant,
    C'est, parmy tes vertus, ce que l'on prise tant :
    Aussi qu'est il plus beau qu'une amitié fidelle ?

    Or, ne charge donc rien de ta soeur infidele,
    De Vesere, ta soeur : elle va s'escartant,
    Tousjours flotant mal seure en son cours inconstant :
    Voy tu comme...

  • L'un chante les amours de la trop belle Hélène,
    L'un veut le nom d'Hector par le monde semer,
    Et l'autre par les flots de la nouvelle mer
    Conduit Jason gaigner les trésors de la laine.

    Moy je chante le mal qui à mon gré me meine :
    Car je veus, si je puis, par mes carmes charmer
    Un tourment, un soucy, une rage d'aimer,
    Et un espoir musard, le...

  • Anges, Trônes et Dominations,
    Principaultés, Archanges, Chérubins,
    Inclinez-vous aux basses régions
    Avec Vertus, Potestés, Seraphins,
    Transvolitez des haults cieux cristalins
    Pour decorer la triumphante entrée
    Et la très digne naissance adorée,
    Le saint concept par mysteres tres haults
    De celle Vierge, ou toute grace abonde,
    Decretee par dits...

  • La neige est belle. Ô pâle, ô froide, ô calme vierge,
    Salut ! Ton char de glace est traîné par des ours,
    Et les cieux assombris tendent sur son parcours
    Un dais de satin jaune et gris couleur de cierge.

    Salut ! dans ton manteau doublé de blanche serge,
    Dans ton jupon flottant de ouate et de velours
    Qui s'étale à grands plis immaculés et lourds,
    Le...

  • Ainsi, ma douce guerrière
    Mon coeur, mon tout, ma lumière,
    Vivons ensemble, vivons
    Et suivons

    Les doux sentiers de la jeunesse :
    Aussi bien une vieillesse
    Nous menace sur le port,
    Qui, toute courbe et tremblante,
    Nous entraîne chancelante
    La maladie et la mort.

  • Cloris, que dans mon temps j'ai si longtemps servie
    Et que ma passion montre à tout l'univers,
    Ne veux-tu pas changer le destin de ma vie
    Et donner de beaux jours à mes derniers hivers ?

    N'oppose plus ton deuil au bonheur où j'aspire.
    Ton visage est-il fait pour demeurer voilé ?
    Sors de ta nuit funèbre, et permets que j'admire
    Les divines clartés...

  • Ce fut un beau souper, ruisselant de surprises.
    Les rôtis, cuits à point, n'arrivèrent pas froids ;
    Par ce beau soir d'hiver, on avait des cerises
    Et du johannisberg, ainsi que chez les rois.

    Tous ces amis joyeux, ivres, fiers de leurs vices,
    Se renvoyaient les mots comme un clair tambourin ;
    Les dames, cependant, suçaient des écrevisses
    Et se lavaient...

  • Ma belle languissait dans sa funeste couche
    Où la mort ces beaux yeux de leurs traits désarmait,
    Et le feu dans sa moëlle allumé consumait
    Les lys dessus son front, les roses sur sa bouche.

    L'air paraissait autour tout noir des nuits funèbres
    Qui des jours de la vie éteignent le flambeau
    Elle perdait déjà son corps dans le tombeau,
    Et sauvait dans...

  • Mais je suis belle d'être aimée,
    Vous m'avez donné la beauté,
    Jamais ma robe parfumée
    Sur la feuille ainsi n'a chanté,
    Jamais mon pas n'eut cette grâce
    Et mes yeux ces tendres moiteurs
    Qui laissent les hommes rêveurs
    Et les fleurs même, quand je passe.