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    À B. MARCEL

    CE n’est pas sur nos maux que la Mer se lamente ;
    Ne berçons plus nos cœurs à la plainte des flots,
    Car nous ne rendrons pas à l’immortelle amante
    Celui que dans l’air vide appellent ses sanglots.

    Ariadne, à Naxos, n’attend plus de Thésée ;
    Les sœurs de Prométhée ont fui le roc amer,
    Les temps sont abolis et la...

  • Du Christ une larme bénie
    Sur l’homme ingrat tombée un jour
    Fut par les anges recueillie
    Et portée au divin séjour

    De cette perle sans pareille,
    Le Seigneur d’un souffle créa
    Un séraphin, chaste merveille,
    Dont le doux nom fut Éloa.

    De cet ange né d’une larme,
    Ô femmes ! vous êtes les sœurs...
    Pour vous douer d’un tendre charme,...

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    L’Énigme désormais n’a plus rien à me taire,
    J’étreins le vent qui passe et le reflet qui fuit,
    Et j’entends chuchoter aux lèvres de la Nuit
    La révélation du gouffre et du mystère.

    Je promène partout où le sort me conduit
    Le savoureux tourment de mon art volontaire ;
    Mon âme d’autrefois qui rampait sur la terre
    Convoite l’outre-tombe et s’...

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    Le crâne des souffrants vulgaires
    Est un ciel presque jamais noir,
    Un ciel où ne s’envole guères
    L’abominable désespoir.

    Chaque nuage qui traverse
    En courant cet azur qui luit,
    Se crève en une douce averse
    Apaisante comme la nuit.

    Une pluie exquise de larmes
    Sans efforts en jaillit à flots,
    Éteignant le feu des alarmes...

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    J’AURAI cinquante ans tout à l’heure ;
    Je m’y résigne, Dieu merci !
    Mais j’ai ce très grave souci :
    Plus je vieillis, et moins je pleure.

    Je souffre pourtant aujourd’hui
    Comme jadis, et je m’honore
    De sentir vivement encore
    Toutes les misères d’autrui.

    Oh ! la bonne source attendrie
    Qui me montait du cœur aux yeux...


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    I

    Mars est venu, la vigne pleure :
    Le vent du nord, passant brutal,
    Fait, sur les branches qu’il effleure,
    Rouler des perles de cristal ;

    Et, peu sensible à tes alarmes,
    Au flanc des côtes sans chemins,
    La terre boit tes grandes larmes,
    Consolatrice des humains.

    Oh ! dis-nous, se peut-il qu’on voie,
    Pour calmer nos «âpres...

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    Vous portiez à ce bal les deux plus belles roses ;
    En les entrelaçant dans l’or de vos cheveux,
    Naïf, je leur avais confié les aveux
    Lâchement retenus entre mes lèvres closes.

    Vous en avez flétri l’éphémère splendeur
    Dans l’étourdissement des valses enivrantes,
    Et leur âme a mêlé ses ondes odorantes
    Aux sons harmonieux du violon rêveur.

    ...
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    Dans les yeux de l’Humanité
    La Douleur va mirer ses charmes.
    Tous nos rires, tous nos vacarmes
    Sanglotent leur inanité !

    En vain l’orgueil et la santé
    Sont nos boucliers et nos armes,
    Dans les yeux de l’Humanité
    La Douleur va mirer ses charmes.

    Et l’inerte Fatalité
    Qui se repaît de nos alarmes,
    Sourit à l’océan de larmes...

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    I

    Semant sur son chemin l’esprit de charité,
    Portant la vie aux morts, à tous la vérité,
    Il s’arrache au désert qui l’aime et qui le fête,
    Et va vers la cité mortelle à tout prophète.

    En Betphagé, déjà, sous ces bois bien connus
    Où l’ombre et le printemps sont d’hier revenus,
    Il touche au sol où doit couler de sources vives
    Son sang...