Bivar était, au fond d’un bois sombre, un manoir
Carré, flanqué de tours, fort vieux, et d’aspect noir.
La cour était petite et la porte était laide
Quand le scheik Jabias, depuis roi de Tolède,
Vint visiter le Cid au retour de Cintra.
Dans l’étroit patio le prince maure entra ;
Un homme, qui tenait à la main une étrille,
Pansait une jument attachée à...
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C’était un soir d’été : de grands nuages sombres
Couraient sous le ciel lourd ; pas un souffle dans l’air,
Les vieux arbres du cloître épaississaient leurs ombres ;
La monotone voix des vagues de la mer
Vers le ciel orageux s’exhalait par bouffées,
Comme un lugubre écho de plaintes étouffées ;
La cloche du couvent venait de retentir ;
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Blanche et douce colombe, aimable prisonnière,
Quel injuste ennemi te cache à la lumière?
Je t'ai vue aujourd'hui (que le ciel était beau !)
Te promener long-temps sur le bord du ruisseau ;
Au hasard, en tous lieux, languissante, muette,
Tournant tes doux regards et tes pas et ta tête.
Caché dans le feuillage, et n'osant l'agiter,
D'un rameau... -
Hier la plage était une plaine aveuglante
Sous l’œil évocateur de la lune en son plein,
Et l’océan rampait, avec sa force lente
Au frisson déferlant de son reflux félin. —Hier la nuit vivante était l’apothéose,
Dans son intensité, de nos rêves vivants ;
La nature berçait d’un calme grandiose
Le repos fugitif des vagues et des vents.Et...
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Au son de musiques étranges
De harpes et de clavecins,
Tandis que flottent par essaims
Les cantiques et les louanges,Elle blanchit robes et langes
Dans l’eau bénite des bassins,
Au son de musiques étranges
De harpes et de clavecins.Et les bienheureuses phalanges
Peuvent la voir sur des coussins
Repassant les surplis des... -
Contre une classe sans entrailles,
Luttant pour le peuple sans pain,
Il eut, vivant, quatre murailles,
Mort, quatre planches de sapin !La chambre mortuaire était au quatrième ;
Et la foule, à pas lents, gravissait l’escalier :
Le Paris du travail, en blouse d’atelier,
Des femmes, des enfants ; plus d’un visage blême.Ce grand...
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IJe n’aimerai jamais, je n’ai jamais aimé ;
Aux lâches passions mon cœur reste fermé.
Mon front est libre et fier ; aucun joug ne le blesse,
Je ne veux rien avoir de l’humaine faiblesse,
Et l’amour est un bât dont le sanglon de fer
S’imprime pour toujours au front qui l’a souffert,
Et je méprise trop toute l’humaine espèce
Pour me... -
Voyez-vous ce blessé qui se tord sur la terre?
Il va mourir ici, pres du bois solitaire,
Sans que de sa souffrance un seul cœur ait pitié;
Mais ce qui doublement fait saigner sa blessure,
Ce qui lui fait au cœur la plus âpre morsure,
C’est qu’en se souvenant, il se sent oublié. -
À ma mère.
La blessée est contre un coussin
...
Trempé du sang de la blessure
Qu’elle porte au-dessous du sein.
Qu’elle est blanche ! Le médecin
N’a pas un seul mot qui rassure.
Ceux qui l’aiment, disent : « Ce soir,
Sera-t-elle vivante ou morte ? »
Les pauvres dont elle est l’espoir
Regardent au trou de la porte. -
O mon cœur, es-tu donc si débile et si lâche,
Et serais-tu pareil au forçat qu’on relâche
Et qui boite toujours de son boulet traîné ?
Tais-toi, car tu sais bien qu’elle t’a condamné.
Je ne veux plus souffrir et je t’en donne l’ordre.
Si je te sens encor te gonfler et te tordre,
le veux, dans un sanglot contenu, te broyer ;
Et l’on n’en saura rien, et...