• Monstre Inspiration, dédaigneuse Chimère,
    Je te tiens ! Folle ! En vain, tordant ta lèvre amère,
    Et demi-souriante et pleine de courroux,
    Tu déchires ma main dans tes beaux cheveux roux.
    Non, tu ne fuiras pas. Tu peux battre des ailes ;
    Tout ivre que je suis du feu de tes prunelles
    Et du rose divin de ta chair, je te tiens,
    Et mes yeux de faucon sont...

  • Une jeune chimère, aux lèvres de ma coupe,
    Dans l’orgie, a donné le baiser le plus doux ;
    Elle avait les yeux verts, et jusque sur sa croupe
    Ondoyait en torrent l’or de ses cheveux roux.

    Des ailes d’épervier tremblaient à son épaule ;
    La voyant s’envoler, je sautai sur ses reins ;
    Et, faisant jusqu’à moi ployer son cou de saule,
    J’enfonçai comme un...

  •  
    S’il est vrai que les amoureux
    Sont partout et toujours heureux
    En germinal comme en brumaire
    C’est qu’il n’est pas d’effroi pour eux
    Car ils ont foi dans la chimère.

    S’ils aiment les sentiers ombreux
    Et la paix des soirs vaporeux
    Et la nature, auguste mère
    S’ils sont rêveurs et langoureux
    C’est qu’ils adorent la Chimère.

    On...

  • Protée est mon parfait emblème :
    Nul jamais ne peut me saisir...
    Je porte un riant diadème
    Formé des roses du plaisir !

    Mon sourire inspire l'ivresse ;
    Mon regard fait germer des fleurs...
    Je suis la grande enchanteresse
    Qui promet l'oubli des douleurs !...

    Mais, aux caresses de mes songes,
    L'homme follement délecté
    Veut en vain par...

  •  
    Il avait l’air hagard quand il entra chez moi,
    Et c’est avec le geste âpre, la face ocreuse,
    L’œil démesurément ouvert, et la voix creuse
    Qu’il me fit le récit suivant : Figure-toi

    Que j’errais au hasard comme à mon habitude,
    Enroulé dans mon spleen ainsi qu’en un linceul,
    Ayant l’illusion d’être absolument seul
    Au milieu de l’opaque et rauque...

  •  
          Tête pâle de ma Chimère
    Dont j’ai, sans la comprendre, adoré la pâleur,
    Tu joins donc maintenant à ce premier mystère,
          Le mystère de ta rougeur !
    Le vermillon soudain qui te prend au visage,
    Quand, ce visage aimé, tu le tournes vers moi,
    Est trop brûlant, trop noir, et roule trop d’orage,
    Pour être de ton sang, ma Chimère au cœur...

  • Pour Gustave Moreau.

    La Chimère indomptable aux yeux profonds et bleus,
    Abîmes rayonnants dans un visage d'homme,
    Des lointaines Memphis aux Babels qu'on renomme,
    Droite, appuie au Zénith ses quatre pieds en feux.

    Son poitrail qui se cabre et ses jarrets nerveux
    Emportent par le gouffre, où l'air siffle et s'enflamme,
    Lascif et douloureux, un...

  • Une jeune chimère, aux lèvres de ma coupe,
    Dans l'orgie, a donné le baiser le plus doux
    Elle avait les yeux verts, et jusque sur sa croupe
    Ondoyait en torrent l'or de ses cheveux roux.

    Des ailes d'épervier tremblaient à son épaule
    La voyant s'envoler je sautai sur ses reins ;
    Et faisant jusqu'à moi ployer sou cou de saule,
    J'enfonçai comme un...

  • La chimère a passé dans la ville où tout dort,
    Et l?homme en tressaillant a bondi de sa couche
    Pour suivre le beau monstre à la démarche louche
    Qui porte un ciel menteur dans ses larges yeux d?or.

    Vieille mère, enfants, femme, il marche sur leurs corps...
    Il va toujours, l?oeil fixe, insensible et farouche...
    Le soir tombe... il arrive ; et dès le seuil qu?...