Émile Nelligan

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    Reine, acquiescez-vous qu’une boucle déferle
    Des lames des cheveux aux lames du ciseau,
    Pour que j’y puisse humer un peu de chant d’oiseau,
    Un peu de soir d’amour né de vos yeux de perle ?

    Au bosquet de mon cœur, en des trilles de merle,
    Votre âme a fait...

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    Les arbres comme autant de vieillards rachitiques,
    Flanqués vers l’horizon sur les escarpements,
    Tordent de désespoir leurs torses fantastiques,
    Ainsi que des damnés sous le fouet des tourments.

    C’est l’Hiver ; c’est la Mort ; sur les neiges arctiques,
    ...

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    Quand, rêvant de la morte et du boudoir absent,
    Je me sens tenaillé des fatigues physiques,
    Assis au fauteuil noir, près de mon chat persan,
    J’aime à m’inoculer de bizarres musiques,
    Sous les lustres dont les étoiles vont versant
    Leur sympathie au deuil des...

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    Jésus descend, marmots, chez vous,
    Les mains pleines de gais joujoux.

    Mettez tous en cette journée,
    Un bas neuf dans la cheminée.

    Et soyez bons, ne pleurez pas...
    Chut ! voici que viennent ses pas.

    Il a poussé la grande porte,
    Il entre...

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    Ce missel d’ivoire
    Que tu m’as donné,
    C’est au lys fané
    Qu’est sa page noire.

    O legs émané
    De pure mémoire
    Quand tu m’as donné
    Ce missel d’ivoire !

    Tout l’antan de gloire
    En lui, suranné,
    Survit interné.
    Quel...

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    J’écoute en moi des voix funèbres
    Clamer transcendentalement,
    Quand sur un motif allemand
    Se rythment ces marches célèbres.

    Au frisson fou de mes vertèbres
    Si je sanglote éperdument,
    C’est que j’entends des voix funèbres
    Clamer...

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    Voici que verdit le printemps
    Où l’heure au cœur sonne vingt ans,
    Larivarite et la la ri.
    Voici que j’ai touché l’époque
    Où l’on est las d’habits en loque,
    Au gentil...

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    Elle a voulu trouver les cloches
    Du Jeudi-Saint sur les chemins ;
    Elle a saigné ses pieds aux roches
    A les chercher dans les soirs maints,

    Ah ! lon lan laire,

    Elle a...

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    Maître Christian Loftel n’a d’état que celui
    De faire des cercueils pour les mortels ses frères,
    Au fond d’une boutique aux placards funéraires
    Où depuis quarante ans le jour à peine a lui.

    À cause de son air étrange, nul vers lui
    Ne vient : il a le froid...

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    Comme Litz se dit triste au piano voisin !

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    Le givre a ciselé de fins vases fantasques,
    Bijoux d’...