Tu veux toi-même ouvrir ta tombe :
Tu dis que sous ta lourde croix
Ton énergie enfin succombe ;
Tu souffres beaucoup, je te crois.
Le souci des choses divines
Que jamais tes yeux ne verront
Tresse dâinvisibles épines
Et les enfonce dans ton front.
Tu répands ton enthousiasme
Et tu partages ton manteau ;
à ta vaillance le sarcasme
Attache un risible écriteau.
Tu demandes à lââpre étude
Le secret du bonheur humain,
Et les clous de lâingratitude
Te sont plantés dans chaque main.
Tu veux voler où vont tes rêves
Et forcer lâinfini jaloux,
Et tu te sens, quand tu tâenlèves,
Aux deux pieds dâinvisibles clous.
Ta bouche abhorre le mensonge,
La poésie y fait son miel ;
Tu sens dâune invisible éponge
Monter le vinaigre et le fiel.
Ton cÅur timide aime en silence,
Il cherche un cÅur sous la beauté ;
Tu sens dâune invisible lance
Le fer froid percer ton côté.
Tu souffres dâun mal qui tâhonore ;
Mais vois tes mains, tes pieds, ton flanc :
Tu nâes pas un vrai Christ encore,
On nâa pas fait couler ton sang ;
Tu nâas pas arrosé la terre
De la plus chaude des sueurs ;
Tu nâes pas martyr volontaire,
Et câest pour toi seul que tu meurs.