• Au beau soleil qui sonnait, de pauvres femmes,
    au seuil d’une maison pauvre comme mon âme,
    désignaient quelque chose. On entendait un char.
    Sur les coteaux marrons le ciel était en nacre
    comme les écailles d’huîtres en arc-en-ciel.
    Le chemin grimpait, doux comme un grand sommeil,
    et les poules chaudes ondulaient dans la poussière,
    avec, sous les ailes...

  • Le front fumant encor d'une ardente besogne,
    L’autre jour, à cheval, dans le bois de Boulogne
    Je courais. – Les sentiers au feuillage nouveau,
    L’encens des bourgeons verts, me montaient au cerveau,
    Et laissant de côté livres neufs et vieux tomes,
    Je me baignais dans l'air aux lumineux atomes,
    Heureux, insouciant, comme tout cavalier
    Que berce du galop...

  • La princesse, dans un palais de rose pure,
    Sous les murmures, sous la mobile ombre dort,
    Et de corail ébauche une parole obscure
    Quand les oiseaux perdus mordent ses bagues d’or.

    Elle n’écoute ni les gouttes, dans leurs chutes,
    Tinter d’un siècle vide au lointain le trésor,
    Ni, sur la forêt vague, un vent fondu de flûtes
    Déchirer la...

  •  
    S’asseoir tous deux au bord d’un flot qui passe,
                Le voir passer ;
    Tous deux, s’il glisse un nuage en l’espace,
                Le voir glisser ;
    À l’horizon, s’il fume un toit de chaume,
                Le voir fumer ;
    Aux alentours, si quelque fleur embaume,
                S’en embaumer ;
    Si quelque fruit, où les abeilles goûtent,...

  • Chairs de vulves ou de gencives,
    Les pétales des fleurs nocives
    Bougent au vent,
    Torpide et lent,
    Qui les pourrit d’automne monotone
    Et les emporte sur l’étang.

    On croirait voir de grands morceaux
    De cœurs brisés,
    On croirait voir de grands lambeaux
    De vie ardente et dispersée,
    On croirait voir de gros caillots...

  • À Gabriel Marc.

    C’est régate à Joinville. On tire le pétard.
    Les cinq canots, deux en avant, trois en retard,
    Partent, et de soleil la rivière est criblée.
    Car la berge, là-bas, la foule est assemblée,
    Et la gendarmerie est en pantalon blanc.
    – Et l’on prévoit, ce soir, les rameurs s’attablant

    Au cabaret, les...

  • La lune de ses mains distraites
    A laissé choir, du haut de l’air,
    Son grand éventail à paillettes
    Sur le bleu tapis de la mer.

    Pour le ravoir elle se penche
    Et tend son beau bras argenté,
    Mais l’éventail fuit sa main blanche,
    Par le flot qui passe emporté.

    Au gouffre amer, pour te le rendre,
    Lune, j’irais bien me jeter,
    Si tu...

  • Au bord de l’eau verte, les sauterelles
              sautent ou se traînent,
    ou bien sur les fleurs des carottes frêles
              grimpent avec peine.

    Dans l’eau tiède filent les poissons blancs
              auprès d’arbres noirs
    dont l’ombre sur l’eau tremble doucement
              au soleil du soir.

    Deux pies qui crient s’envolent loin, très loin,...

  •  
    À Madame D.-G. Garon.

    À Percé. ― Le soleil est couché. Tout s’endort
    Sur la plage. La mer à peine se balance
    Autour du Roc géant où lentement commence
    De s’étendre la nuit pâle de Thermidor.

    Déjà les goélands ont ployé leur essor,
    Et le dernier pêcheur vient de rentrer dans l’Anse
    C’est l’heure du souper, et des toits blancs s...

  • AU BORD DU QUAI

    En un pays de canaux et de landes,
    Mains tranquilles et gestes lents,
    Habits de laine et sabots blancs,
    Parmi des gens mi-somnolents,
    Dites, vivre là-bas, en de claires Zélandes !

    Vers des couchants en or broyé,
    Vers des caps clairs mais foudroyés,
    Depuis des ans, j’ai navigué...